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Voight Kampff

Voight Kampff a ce petit truc en plus qui fait qu’il ne ressemble à aucun autre groupe. Des musiciens passionnés qui n’hésitent pas à réenregistrer leurs morceaux en studio quand ils remarquent « qu’ils ne vont pas dans le bon sens ». Des fans de science-fiction et de Metal qui se retrouvent pour développer un projet hors norme : faire un album basé sur l’œuvre Blade Runner. Des artistes courageux qui un an après le décès de leur guitariste, Mathieu Broquerie, remontent sur scène. Quelques heures avant leur concert du vendredi 13 septembre à l’Étage (Garmonbozia / I’m From Rennes), ils ont accepté de répondre aux questions de Metalorgie. Entre échanges autour de K. Dick et d’Azimov, les musiciens sont revenus sur la sortie de lexcellent Substance Rêve (label Sliptrick Records) : une réussite tant au niveau technique, qu’artistique. Un album cohérent et pointu qui laisse la part belle à l’imaginaire. Mais avant d’en savoir plus, une petite explication s’impose… Voight Kampff est la machine utilisée par les Blade Runners : policiers en charge d’arrêter et de déterminer si un individu est un répliquant ou non. Il faut croire que l’inspiration ne s’est pas tarie avec le temps… comme quoi, un simple nom de groupe peut se révéler porteur d‘un véritable projet.

1 – Motocultor, Hellfest, les 15 ans de Garmonbozia… Être sur un label donne-t-il accès aux grosses scènes ?
Z : pas du tout. C’est plutôt Garmonbozia qui nous a mis dans la prog des 15 ans et celle du Hellfest. Pour le Motocultor, on a gagné un tremplin au 4BIS. C’est comme ça qu’on s’est retrouvés à jouer là-bas.
Gaël : ça nous aurait peut-être pris plus de temps en autoprod.
Z : on ne joue pas beaucoup. Pas plus de 10 dates par an mais c’est un choix. On ne joue pas souvent mais ce sont toujours de belles scènes, dans de bonnes conditions.

2 – La pochette de l’album est signée Caza. Comment s’est concrétisé le projet ? A-t-il écouté les morceaux enregistrés en studio avant de vous proposer un visuel ?
Gaël : avec Mathieu, on cherchait mais ne trouvait pas un visuel qui nous correspondait. On l’a contacté, tout simplement. Et ça a collé tout de suite.
Z : il nous a envoyé 8 croquis avec le titre des morceaux. On lui en a précommandé 2 qu’il a enrichi et finalisé. C’est quelqu’un de très accessible. On est tous fans de S.F. et on voulait retrouver cette ambiance sur la pochette de l’album.

3 – Pyromancer, tu as remplacé Oliv à la batterie. Comment as-tu posé ton jeu ? As-tu pris en compte ce qu’il a fait sur l’album ?
P : les deux. J’ai beaucoup écouté l’album. J’ai gardé des éléments de la vision d’Oliv mais je voulais aussi mettre ma patte dans les morceaux. On a pas du tout la même façon de faire de la batterie. J’ai un jeu plus chargé, je remplis plus les espaces. Oliv a une approche plus épurée. J’ai eu beaucoup de liberté, les gars m’ont laissé faire ce que je voulais.
Z : il est aussi guitariste. Et ce qu’il a fait avec nos morceaux est très bon.
Moi : tu joues de la guitare dans quel groupe ?
P : dans Architect of Cult.

4 – Votre musique est à la fois très technique et hypnotique, comment composez-vous ? Dans un même morceau, faites-vous le choix de moment purement instru et d’autres plus propices à poser la voix ?
Gaël : pour le deuxième album, les morceaux ont été composé par Oli, Mathieu, moi et Z. On a tous participé.
Z : c’est pas une science exacte. Quand on se retrouve pour travailler ensemble, il y a des erreurs qu’on garde parfois.

5 – Vous n’habitez pas les uns à côté des autres, comment travaillez-vous ?
Z : c’est pas facile. On travaille beaucoup à la maison avec Cubase. On essaie de répéter au mieux une fois par mois. C’est clair qu’on ne peut pas arriver en répète sans connaître les morceaux.
P : on s’est bien trouvé aussi. On a vraiment de la chance que ça marche.

6 – Le nom du groupe, la thématique de l’album… L’univers de Philippe K. Dick est plus qu’une source d’inspiration pour vous. Les sujets développés par l’auteur sont-ils inépuisables ?
Gaël : son imaginaire est à son image. C’est fou quand même, il a imaginé des choses qui sont en train de se passer en ce moment. Après, sur Blade Runner, je pense qu’on a fait le tour avec l’album.
Z : on pourrait s’inspirer d’autres auteurs de S.F. comme Azimov.

7 – Les adaptations cinématographiques de K. Dick comme A Scanner Darkly ou Blade Runner (R. SCOTT et VILLENEUVE) sont-elles aussi sources d’inspiration dans votre travail ?
Z : le film de R. SCOTT, clairement oui. Il y a plusieurs lectures à voir. Celui de VILLENEUVE, j’ai bien aimé : l’esthétique, les acteurs, Ryan Gosling… c’était vraiment super mais la musique moins. Après, c’était pas la même magie, je ne le découvrais pas avec mes yeux de mino.

8 – Question K. Dick : selon vous, qu’est-ce que le réel ?
Z : oh là comme ça, c’est pas simple comme question.
Gaël : on a tous des perceptions de ce qui se passe. Par exemple, si j’étais à l’extérieur de cette scène, de ce qui se passe en ce moment précis, ça serait plus simple. Je serai plus objectif. En fait, il manque une dimension pour le définir.
Z : c’est pas mal comme réponse.
P : Ouais, c’est bien.

9 – En réalité, l’album a été enregistré deux fois. Vous n’étiez pas satisfaits de votre travail sur la première version, alors vous avez décidé de tout refaire. Une décision très courageuse. Faut-il arriver à une certaine maturité musicale pour être capable d’avoir ce recul ?
Z : non, c’est surtout le fait qu’on ne sorte pas beaucoup d’albums. On voulait quelque chose qui nous plaise. On a retravaillé le processus d’enregistrement.
Gaël : quand on travaillait sur la première version, on avait même l’impression que ça nous échappait.
Z : on savait que ces morceaux-là valaient mieux.

10 – Un groupe que vous écoutez toujours ?
Z : Death, l’album Symbolic.
P : Death, pareil.
Gaël : Coroner, n’importe quel album.

11 – Un mot sur l’hommage rendu ce soir à Mathieu Broquerie ?
Z : on est touché par cette attention. Pour nous, c’est encore délicat. Ce soir, on va penser à lui. C’était quelqu’un qui était vraiment très actif sur la scène rennaise.
Gaël : il arrivait toujours à bonifier les gens. C’est pas parce qu’il n’est plus là que je dis ça mais avec lui, on avait l’impression d’être meilleurs. On a l’impression d’avoir une partie de nous-même.

12 – Qu’est-ce qu’on vous souhaite pour la suite ?
Z : de bons concerts et des enregistrements. Jouer. Faire de la musique encore.
Gaël : de bons concerts avec Clément aussi. Il s’est beaucoup investi pour apprendre les morceaux.

Les Tambours du Bronx et Reuno en mode WOMP

Découvrir les coulisses d’un concert, c’est comme braver un interdit. On ne sait pas trop si on a le droit d’être là, alors on se fait tout petit pour ne pas gêner… et on profite du moment. Mais comment retranscrire sur papier ce qui se passe en backstage ? Quels éléments retenir pour écrire un article ?
Traiter l’aspect technique peut se révéler compliqué. Le matériel, les balances, la sonorisation… Pour s’atteler au sujet, il faut s’y connaître et être capable de vulgariser ses propos. Ce n’est pas à la portée de tout le monde… Reste l’ambiance. Traduire l’atmosphère avant un show est sans doute la meilleure approche. Mais là encore, ce n’est pas si simple… Raconter cet instant de flottement avant l’arrivée sur scène est hasardeux. Rendre compte de l’état d’esprit des musiciens, savoir ce qui les pousse à se dépasser soir après soir… Rien de cela n’est visible de l’extérieur. Tout se passe à l’intérieur du groupe et le badaud est bien incapable d’interpréter quoi que ce soit. Pour ne pas commettre d’impairs, la meilleure solution reste l’échange. L’interview est inévitable…. mais encore faut-il l’obtenir…
Les Tambours du Bronx ont accepté de se prêter à l’exercice lors de leur passage à Rennes. Présents depuis plus de trente ans sur la scène française et internationale, ces percussionnistes urbains se sont fait un nom. Véritables orfèvres, ils orchestrent des show à l’énergie brute. Des cogneurs, qui une fois lancés, ne lâchent rien ! Pour faire vibrer les bidons, pas moyen de tricher : le geste est ample, le visage est expressif… Ils mettent du cœur à l’ouvrage sans jamais faiblir. Une recette imparable qui rend leur jeu unique. Ce vendredi 5 avril, vers 18h30, ils terminent les balances. De nouveaux instruments trônent parmi les bidons : guitare, basse, batterie… Les Tambours du Bronx sont en mode WOMP : un projet Metal qu’ils portent depuis l’été 2018. Sorti le 19 octobre, l’album aux accents Indus prend toute son ampleur en Live : un son puissant couplé à une musique efficace. À aucun moment, la rage n’est contenue : au contraire, elle est portée par des textes engagés qui répondent comme un écho à l’énergie des bidons. En ces temps où la prise de risque se raréfie, l’approche est audacieuse ! Une véritable bouffée de créativité qui prouve que se réinventer a du bon. À moins de deux heures de l’ouverture des portes, certains musiciens peaufinent leurs réglages, d’autres se posent dans les loges… Pas mal d’allers et retours dans les couloirs : le batteur Franky Costanza – Dagoba, Blazing War Machine –, s’arrête pour saluer et discuter avec les gens de passage. Une partie des membres du groupe Flayed – qui assurent la première partie – font de même. La horde n’est pas encore lâchée mais elle est déjà dans l’ambiance du concert de ce soir. Quatre d’entre eux ont accepté de répondre à une dizaine de questions : Dom – qui passe à la guitare sur WOMP –, Will – aux Tambours – M’sieur Reuno au chant – Lofofora, Mudweiser, Madame Robert – et un invité surprise, Luc – aux Tambours –. Installés sur des flight-cases, l’interview commence en haut des escaliers du Liberté. Juste avant l’arrivée du public, l’instant semble assez irréaliste… et il l’est. Une parenthèse d’une trentaine de minutes avant l’effervescence.

1 – Comment se vit un partage de scène avec Sepultura ? Travailler avec eux a-t-il été l’élément déclencheur pour faire un album Metal ?
Dom : être sur scène avec eux, c’est une énorme claque. Sepultura, c’est violent mais Les Tambours aussi, alors les deux ensemble… Sur scène, on ressent vraiment toute cette grosse énergie. C’est quelque chose ! On a fait pas mal de dates avec eux, que des gros festivals.
Will : on a joué en Allemagne, au Portugal, au Brésil, à New-York…
Dom : ouais, et c’est vrai qu’en réfléchissant à un nouveau spectacle, on s’est dit pourquoi pas Metal ?

2 – Les Tambours, Reuno (Lofofora), Franky Costanza (Blazing War Machine, Dagoba), Stéphane Buriez (Loudblast)… Je ne les cite pas tous mais il y a du beau monde. Qui a eu l’idée de réunir tous ces excellents musiciens ?
Dom : Tout est parti d’une blague… Il y a quelques années, on avait dit à Franky « si tu t’emmerdes chez Dagoba, viens avec nous. » On s’est retrouvés plus tard et une fois qu’il a accepté le projet, on a contacté Reuno qui a proposé à Stéphane Buriez de nous rejoindre.
Reuno : je leur ai dit que j’étais pas dispo mais que je me débrouillerai pour l’être. J’avais envie de leur écrire des chansons, de bosser avec eux… Si j’avais refusé, je l’aurais regretté. Mais avec mes autres projets, je savais que je ne pourrai pas assurer toutes les dates, j’ai donc proposé un binôme avec Stéphane Buriez (Loudblast). Renato (Trepalium, Flayed) nous a rejoint aussi tout récemment au chant. Il sera d’ailleurs là ce soir.

3 – Les compos de l’album regorgent d’influences différentes. Un mélange qui sonne Metal, Punk, Rock et même Indus. Qui a posé les premiers jalons des compositions ? Comment s’est organisée cette phase de création ?
Dom : chez les Tambours, on écoute de tout. Niveau âge, le plus jeune a 25 ans et le plus vieux 60 ans. On représente tous des générations différentes et on se nourrit des influences de chacun. Pour ce projet, on est quelques Tambours à être passés à la guitare. On a commencé à composer de notre côté et les textes ont suivi avec Reuno et Stéphane.

4 – Voix, basse, guitare, batterie et pas mal de tambours… En studio, comment on obtient ce son limpide et puissant à la fois ?
Dom : on a tout bossé à la maison, dans notre propre studio. À force, on commence à avoir l’habitude d’enregistrer les bidons, on cherche à garder l’énergie même si on sait que ça ne sera jamais comme sur scène. Le mixage a aussi était très important, on a travaillé avec Hk Krauss (Vamacara Studio).
Reuno : avec Buriez, on a couché toutes les voix en deux jours. Tout s’est fait très simplement.

5 – Comment travaillez-vous avec Franky Costanza ? Face à une telle masse rythmique, est-ce à la batterie de s’adapter ?
Will et Dom : oui, clairement.
Dom : il s’est beaucoup remis en question. Il a su s’adapter, jouer avec les bidons en simplifiant son jeu. Il ne charge pas son jeu, n’en fait jamais trop… Il s’est parfaitement intégré aux Tambours.
Reuno : son jeu groove vraiment sur cet album.

6 – Reuno, comme dans Lofo, les textes percutes. Des mots engagés mais toujours emprunts de poésie. La société t’inspire mais as-tu des noms d’auteurs et/ou de musiciens qui t’ont aidé à façonner ton écriture ?
Reuno : je suis un peu old school… Le Professeur Chauron, Jean-Yann, Coluche… Claude Nougaro aussi. C’est un mec qui arrivait à faire des textes très percutants, le son des mots compte chez lui.

7 – Reuno, même dans tes reprises, l’interprétation est habitée. La force des textes est-elle le secret ?
Reuno : il faut le jouer à fond. Le studio, c’est comme le cinéma mais la scène, c’est comme le théâtre. Les gens doivent comprendre tout de suite l’interprétation.

8 – Au Motocultor, vous avez fait une prestation qui a scotché tout le monde. À aucun moment l’énergie n’était contenue. Derrière les fûts, Franky parle de « horde » et vu du public, c’est clair que la horde est bien là. Est-ce que vous abordez vos presta sur les plus petites scènes de la même façon ?
Dom : peu importe la scène. C’est la marque des Tambours ! On ne peut pas se freiner. L’identité des Tambours, c’est le côté horde. On ne fait qu’un avec le bidon.
Reuno : se freiner, ça serait comme courir au ralenti.
Luc : il faut penser puissance. Toujours.
Will : tu ne sais jamais comment va terminer le concert. On est épuisés mais on continu, on se soutient les uns, les autres.

9 – Vous êtes des musiciens libres. Garder son indépendance passe-t-il par une part de Do it yourself ?
Dom : oui et non. Il y a forcément un peu de DIY, c’est le secret de notre longévité et c’est vrai qu’on a pas mal gardé le contrôle même si on est entouré de professionnels. Mais je te dirai qu’aujourd’hui c’est de plus en plus compliqué d’être seuls.

10 – Se réinventer, un adage qui vous correspond ? Pouvez-vous nous parler de vos projets parallèles ?
Reuno : plus je vieillis, plus j’ai envie de créer. Le Rock est bien pour ça, c’est pas une musique confortable, ça nous pousse à aller vers de nouveaux challenges et artistiquement, ça me remplit. Le projet des Tambours me plaît mais j’ai aussi mon groupe de stoner Mudweiser (il montre son T-shirt). Je prépare aussi les textes du 11ème album de Lofofora. Et plus récemment, il y a Madame Robert.
Dom : on a toujours notre spectacle classique. On est en train de le revisiter : on revient avec un son plus percussion, toujours avec Franky mais avec un stand percu-électro cette fois. On a aussi un autre projet avec Will.
Will : je suis aussi batteur dans un groupe avec Dom mais là, on a pas le temps de bosser dessus. On espère y revenir dès qu’on pourra.
Dom : on travaille avec Apolline. C’est elle qui est au chant sur l’album pour la reprise de Prodigy.

11 – Un combat/un engagement qui vous semble prioritaire aujourd’hui ?
Reuno : l’environnement. Que les gens se responsabilisent et qu’ils arrêtent d’acheter de la merde. On a tous des enfants, il faut penser à la planète qu’on leur laissera. C’est la priorité.

12 – Deux noms de groupes et/ou de musiciens que vous écoutez toujours ?
Dom : oh, c’est compliqué comme question. Il y en a trop ! Là en ce moment, s’il faut t’en donner un, je dirai Prong mais j’écoute vraiment plein d’autres groupes. J’aime aussi beaucoup le Crossover mais on a une culture musicale très variée chez les Tambours, alors je pourrai te citer plein de styles et de références.

Denis Barthe

Rennes, vendredi 7 décembre 2018. De la pluie, du vent… et des passants qui courent pour s’abriter. Pas de chance… l’heure tourne et le mauvais temps redouble. Et puis, sans prévenir… l’éclaircie arrive. C’est le moment d’en profiter ! Le QG des Bars en Trans n’est pas loin… Situé sur une voie parallèle à la rue de Brest, l’endroit est discret : une façade grise, des gens qui discutent dans une arrière cour mais pas plus d’indication. C’est à l’intérieur, que tout se précise : avec une émission de radio en direct, un concert et des interviews, il règne ici une cacophonie organisée. Un rapide coup d’œil, un renseignement à la borne d’accueil… Ouf.. The Very Small Orchestra n’est pas encore là. Il n’y a plus qu’à attendre.
Vers 16h00, les musiciens font leur entrée et ils n’ont de small que le nom. Ils sont six et parmi eux, des visages connus : Vincent Bosler (The Hyènes…), Kiki Graciet (Niko EtxartCalvin Russell…) et bien sûr Denis Barthe (Noir Désir, The Hyènes, Mountain Men…). À peine arrivés, ils prennent place derrière les micros de C Lab et de Radio Campus Paris. Les questions des chroniqueurs défilent et d’emblée, le ton tranche avec le groupe précédent. Les musiciens sont plus francs, plus instinctifs… sans artifices. Leur musique, ils la définissent comme rock, presque cinématographique. Entre deux blagues, ils expliquent qu’ils sont allés là où on ne les attendait pas : « au départ, il n’y avait que Kiki et moi et puis, c’est devenu une grosse blague. On s’est dit, on invite des potes à faire un album et pourquoi pas faire un concert de temps en temps avec tous les gens qui ont participé et ça s’est développé comme ça », explique Vincent Bosler. « C’est la cour de récréation (…) oui, on se permet tout ce qu’on se serait pas permis dans nos groupes respectifs. (…) on est en mode Do it yourself et je ne devrai pas le dire mais jusqu’au troisième album, on avait pas une répète au compteur. On montait sur scène, on jouait et c’est ce qui plaisait à tout le monde », ajoute Denis Barthe. Et il est clair que quand on les voit sur scène, l’expérience est indéniable ! Avoir suffisamment de bouteille pour être capable d’improviser devant un public, c’est ce à quoi aspire tout bon musicien et ils le font. La liberté… et la musique comme acte politique, Denis Barthe est le premier à relever ces engagements : « on habite un pays où sur les mairies, il y a noté liberté, égalité, fraternité… ça commence par liberté et tous les jours, on t’en éteint une petite. » Des mots qui font sens et que le batteur clame depuis presque quarante ans. Avec Noir Désir, il s’exprimait déjà sans filtre : un franc-parler devenu presque militant dans la France d’aujourd’hui. Une façon d’être qui transparaît jusque dans son jeu de batterie… Précise, claire : sa frappe est sans concession et ses plans toujours justes. Une réelle identité rythmique qui colle parfaitement à The Very Small Orchestra et The Hyènes… et qui marquera à jamais les mémoires dans Noir Désir. Avec beaucoup d’honnêteté et de simplicité, il a accepté de répondre à quelques questions. Un moment volé entre deux interviews…

1 – La rencontre avec la batterie, un heureux hasard ?
J’ai rencontré mes potes dans une fiesta. J’ai discuté avec Serge en premier et il m’a montré un mec plus loin, c’était Bertrand, il m’a dit on va monter un groupe ça te brancherait ? J’ai répondu oui. C’est comme ça que le groupe a commencé. J’avais jamais touché à une batterie, je n’ai rien dit, j’avais envie au moins d’essayer. Je me suis entraîné comme un fou pendant quinze jours sur un kit acheté d’occasion et à la fin de notre première répète, Serge m’a dit « tu connais Highway to Hell » et là encore, j’ai répondu oui, on à terminé par ça je ne savais pas que c’était parti pour trente ans. Après, j’ai aussi la chance d’avoir un frangin qui aime la musique, ça m’a rendu curieux. Il jouait de l’orgue, avait aussi une belle collection de vinyles et ça a compté dans mon adolescence.

2 – Vous avez une frappe précise, percutante. Est-ce le fait d’avoir intégré tout de suite un groupe qui vous a permis d’acquérir une telle efficacité ?
Intégrer un groupe, ça aide. J’aime pas bosser seul. Je travaille si possible au moins avec un bassiste ou un guitariste. Quand je suis en solo, c’est pour travailler une technique précise ou un plan que j’ai en tête. Je peux aussi dire merci à deux producteurs : Ted Nicely et Ian Broudie qui m’ont beaucoup apporté. À la base, je suis un autodidacte et en bossant avec eux, ils m’ont poussé là où je ne serai peut être jamais allé. J’ai beaucoup appris, notamment à jouer avec le clic, à l’anticiper et contrôler ma frappe.

3 – Deux mots pour décrire un bon batteur ?
Quelqu’un qui sait avant tout écouter, qui a bien sûr du feeling mais aussi de l’instinct. Même avec une bonne technique, si tu ne transmets pas les bonnes sensations, ça ne donnera rien d’intéressant. 4 – Le matériel, c’est important pour vous ? Sur quoi jouez-vous ? Le matériel c’est du plaisir et il faut surtout trouver le kit qui te correspond. J’ai entre autre une Pearl, la même depuis 1996. Je suis surtout habitué à cette batterie, j’ai mon propre réglage et elle me convient parfaitement.

4 – Le matériel, c’est important pour vous ? Sur quoi jouez-vous ?
Le matériel c’est du plaisir et il faut surtout trouver le kit qui te correspond. J’ai entre autre une Pearl, la même depuis 1996.  Je suis surtout habitué à cette batterie, j’ai mon propre réglage et elle me convient parfaitement.

5 – Quel type de musicien vous inspire ?
Je suis attaché aux gens qui toute leur vie tracent le même sillon en essayant de le faire le mieux possible Des gens qui vont au bout des choses : les perfectionnistes.

6 – Si je vous dis Tostaky ?
Un grand souvenir. Un grand moment, et un grand virage aussi… On savait qu’il n’y aurait pas de Tostaky 2 on était allé au bout de quelque chose, ce qui allait suivre serait forcément différent.

7 – Dans vos concerts, vous aviez l’habitude de ne jamais faire la chanson Tostaky de la même façon.
On avait des approches différentes dans l’instant, c’est ce qui nous plaisait, la liberté de faire à toujours été vitale.

8 – Si je vous dis Les Têtes Raides ?
Ce sont des amis. Un très beau souvenir et une grande fierté d’avoir produit l’album Fragile. On les a connu en collaborant sur la chanson L’identité, nous avons tous bossé ensemble comme des vieux potes que nous n’étions pas encore et que nous sommes devenus.

9 – Quel souvenir gardez-vous de votre rencontre avec Alain Bashung ?
C’était quelqu’un d’infiniment gentil. Discuter avec Alain Bashung, c’était comme se balader dans un jardin luxuriant. C’était à la fois quelqu’un de très simple et un véritable artiste en recherche d’absolu, en un mot La classe.

10 – L’engagement faisait partie de l’identité de Noir Désir et vous n’étiez pas le dernier à vous exprimer. Aujourd’hui, qu’en est-il ? Quel est le combat qui vous semble prioritaire ?
Aujourd’hui, on devrait se battre avant tout pour la liberté, elle perd du terrain chaque jour. Le problème, c’est que le manque de solidarité gagne du terrain et l’individualisme ne mène à rien.

11 – Quand Albert Dupontel vous a contacté pour composer la B.O. de son film Enfermés Dehors. Avez-vous accepté tout de suite ? Comment s’est traduit l’exercice ?
Il m’a téléphoné pour me dire que le thème de son film était plutôt rock’n’roll et qu’il aimerait que nous bossions ensemble. A ce moment-là, il m’a vraiment redonné envie de jouer de la musique. On a travaillé en studio chez moi avec Jean-Paul Roy et Vincent Bosler directement à l’image, avec Albert. Il nous a dit ce qu’il voulait sur telle ou telle scène, on proposé des choses et le boulot s’est engagé. The Hyènes est né suite à la suite ça et le nom du groupe fait clairement référence à la scène culte de Bernie.

12 – Avez-vous envie de travailler avec d’autres réalisateurs ?
Oui, on a déjà travaillé sur un court-métrage qui s’appelle Desperadiou, on joue dedans, un hasard et des rencontres. On est ouvert à ce genre de propositions, c’est super intéressant.

13 – Le groupe The Hyènes, encore un heureux hasard ?
Oui en quelque sorte, une rencontre d’éléments incontrôlés et incontrôlables, on prépare un nouvel album, sortie et tournée en 2020

14 – Des groupes que vous écoutez en ce moment ?
Pogo Car Crash Control, Delgres, Gunwood et je réécoute aussi RL Burnside ces temps-ci.

15 – Un souhait pour les années à venir ?
Qu’on essaie tous d’être plus heureux, ça peut paraître con mais au fond qu’il y a t-il d’autre d’important ?

Henry Padovani

Rennes, jeudi 6 décembre 2018. Il est tôt mais les gens investissent déjà le Mondo Bizarro. Il faut dire que ce soir, Bruno a soigné sa prog. : il reçoit The Flying Padovanis, un groupe qui existe depuis 1981 et qui défend un son instru rock. C’est fluide, hors du temps… une musique avec une forte empreinte cinématographique qui pourrait s’inscrire sur la B.O. d’un film de Quentin Tarantino. Porté par une technique impeccable, Henry Padovani (The Police, Kim Wilde, Wayne County & the Electric Chairs…), Paul Slack (Uk Subs…) et Chris Musto (Kim Wilde, Nico, Joe Strummer, Glen Matlock, Johnny Thunders…) sont les dignes représentants d’un son qui ne vieillit pas. Ça sent le concert mémorable, non ? Oui, sauf que le batteur n’est pas présent. Sortant tout juste d’une opération, il est remplacé au pied levé par Thomas, un jeune musicien qui n’en revient toujours pas d’être là. Dans la loge, Henry Padovani discute à la cool. Guitare sur les genoux, il parle gratte avec les membres de Wolfoni qui assurent la première partie. L’ambiance est détendue. Pas de stress ici, la musique fait partie du quotidien. Pendant l’interview, Henry raconte tout : ses premiers années à Londres, sa rencontre avec Sting, son travail de producteur chez IRS Records… Beaucoup de franchise et de sagesse dans ses propos… et toujours les mots justes quand il cite ceux qui ont croisé sa route. Les musiciens, les amis… tout se mêle. Les gens avec qui il joue, il les connaît depuis presque quarante ans : une confiance totale qui fait toute la différence. Oui, le musicien excelle dans son art mais tout prend sens quand il donne la réplique à Paul, Chris… ou Sting. Aujourd’hui, moins de dix minutes avant d’entrer en scène, Henry déconne avec Paul, son complice de toujours. Profiter de l’instant présent, jouer devant un public qu’il ne connaît pas… Le live, il n’arrêtera jamais. Apprendre non plus. Se perfectionner encore et encore… Seuls les Grands ont cette volonté de peaufiner leur technique à l’infini. Affûter, faire mieux, aller au bout de sa passion… Un regard tourné vers l’avenir qui donne une bonne leçon d’humilité. Est-ce là le secret de son talent ?

Interview en solo

1 – Vous avez commencé la guitare à 14 ans, qui vous a inspiré ? Comment avez-vous commencé à jouer ?
J’étais en vacances chez ma grand-mère et je m’ennuyais. On était au lit à 21h tous les soirs. Je lisais un « Bonne soirée ». Tu connais ? Je fais non de la tête.
Dedans, il y avait un encart sur « Apprendre la musique sans peine ». J’ai essayé en jouant sur la guitare que m’avait offert mon oncle. Il avait dû me l’offrir à 9 ans mais je n’y avais jamais touché jusque là.

2 – Pourquoi être parti à Londres ? C’est la musique qui vous a attiré là-bas ?
J’ai rencontré un anglais qui m’a dit d’y aller, qu’il pouvait m’héberger. J’étais juste parti en vacances. Je devais y être pour 15 jours et j’y suis resté.

3 – Un souvenir marquant de cette époque ?
La première fois que je suis allé dans un club. À cette époque, j’avais les cheveux longs et une barbe : j’étais un hippie. Quand je suis entré, c’était le choc. Le lendemain, j’ai changé de look, j’ai tout rasé.

4 – The Police avait un côté plus rock, presque punk à ses débuts. Était-ce votre empreinte à
vous ou celle de Stewart Copeland ?
Stewart avait monté le groupe. À l’époque, il jouait dans un groupe progressif qui avait pas mal de succès et il savait exactement ce qu’il voulait. Avec The Police, il avait tout prévu et j’ai suivi. Il est allé chercher Sting qui voulait faire du jazz-rock mais à ce moment-là, il n’avait pas d’autres projets. Il nous a rejoint et ça a commencé comme ça.

5 – Vous avez été directeur et vice-président de IRS Records. Dans quels projets vous êtes-vous le plus investi ?
Henri : The Fleshtones, Concrete Blonde… Tout le monde a dit que j’avais signé REM mais c’est faux. Mais oui, IRS Records les a signé : on voulait vraiment que ça marche et c’est ce qui s’est passé.

6 – Que pensez-vous du paysage musical actuel ?
Aujourd’hui, j’écoute surtout des morceaux que j’ai envie d’étudier. En ce moment je travaille du JB Lenoir. Je n’ai jamais eu le temps de le faire et là, je le prends.

7 – Et en France ?
Je ne sais pas. Je ne connais plus. Avant, j’écoutais pas mal de groupes mais plus maintenant. J’ai quand même parfois de bonnes surprises : je suis tombé sur un groupe les Cinq Oreilles. Très bon !

8 – Un mot pour définir ce qu’est un bon musicien ?
Quelqu’un qui est bon à ce qu’il fait. John Lee Hooker, il ne fait qu’un seul accord mais qu’est-ce qu’il le fait bien ! Radiohead, par exemple. Ils sont très bons dans leur domaine mais je suis pas sûr qu’ils pourraient faire autre chose.

9 – Un événement marquant de votre carrière ?
Le prochain concert.

10 – Un mot sur le concert du 12 novembre 2016 au Bataclan, avec Sting ?
C’était un moment que je devais partager avec lui. Je crois qu’il voulait vraiment qu’on soit ensemble. Être là tous les deux. Dans le public, les gens avaient des portraits de ceux qu’ils ont perdu et Sting a su mettre une ambiance. Il a osé y aller, là où beaucoup ont refusé. La classe ! Oui, Sting a la classe !
Il s’arrête un moment et reprend.
Tu sais, avec mon fils, on devait aller au concert de The Eagles of Death Metal. Ce soir-là, j’ai préféré rester au chaud au coin du feu. Mon fils n’a pas bougé non plus.

11 – Quand on a vécu autant de vies, est-ce qu’on a encore des rêves à réaliser ?
Je fais beaucoup de concerts et j’ai encore envie d’en faire. Aujourd’hui, j’aspire à une vie tranquille avec ma compagne. Une vie simple.

Interview en duo

1 – Votre définition du rock ?
Henry : ce petit truc indéfinissable. Le style.
Paul : Henry.

2 – Depuis quand jouez-vous ensemble ?
Henry : 1981, 1982… Je crois que Paul a retrouvé une image d’archives…
Paul, le bassiste sort son portable et montre le visuel d’une vieille annonce. C’est celle à laquelle il a répondu quand il a intégré le groupe.
Paul : mars 1981.

3 – Le rock dans les années 80, c’était comment ?
Paul : c’était fou !

4 – Sans Cafés Concerts, pas de diversité musicale. Avez-vous un lieu de référence à nous faire partager ?
Henry : Chez Picolo (en Aveyron). Je pense à lui mais il y en a plein !

5 – Une rencontre qui a marqué l’histoire de votre groupe ?
Henry : Paul.

6 – Votre musique pourrait avoir sa place dans un film. Un film de Tarantino, par exemple. Vous êtes d’accord avec ça ?
Henry : complètement. Tu parles de Tarantino parce que tu es jeune mais avant, il y en avait beaucoup des groupes comme ça. Aujourd’hui, il n’y en a plus beaucoup. On est là pour faire vivre cette musique, montrer qu’elle existe. Et parfois, on est très étonnés… On est tombés sur un groupe – Les Infidèles – qui faisait des reprises de The Flying Padovanis.

La Morte Amoureuse

Un classique de Théophile Gautier sur le thème des vampires. Un livre entre le livre d’artiste et le fanzine… avec une illustration originale de Rolland Chauvière.

Reliure artisanale.
Nouvelle édition prévue pour 2024.

L’as-tu vu ?

Petite histoire à chanter. Un classique dessiné et réorchestré par Sandrine Besnard.

Prix : 5€
Édité à la demande.
Reliure artisanale.
150 exemplaires numérotés.

Fanzine n°2 spécial Scène Locale

Ubutopik met en avant les acteurs de la scène locale. Un coup de projecteur sur une dizaine de passionnés qui travaillent au quotidien avec des groupes professionnels et amateurs.  De Rennes à Nantes, rencontre avec Gweno du Ty Anna Tavarn, Alain et Seb du Marquis de Sade, Adrien du fanzine Metalorgie, Thomas du festival les Lunatiques, Éric et Agnès d’Ankou Prod, Tom, Gaétan, Flav’ et les musiciens de Barrel Kick. Les articles et les interviews ont été réalisés entre 2018 et 2019.

Tarif : 5€.
Reliure artisanale.

 

 

Canal B : Metal Injection (septembre 2019)

Et oui, déjà quatorze ans que Metal Injection fait la part belle aux musiques extrêmes. Animé par Yannick, Olivier, Marion et Arthur, l’émission de CanalB balaie l’actualité du Metal tous les dimanches de 21h30 à 23h00. Au programme : de l’info mais aussi une sélection de morceaux soigneusement choisis par l’équipe. Il faut dire que les présentateurs en connaissent un rayon sur le sujet : du Heavy au Black ils parlent avec la même ferveur de groupes internationaux que de formations locales. Mais comment expliquer cette longévité ? Les années passent et deux des présentateurs d’origines sont toujours là. Entre le quotidien et les journées de boulot, ils se retrouvent chaque semaine dans les studios de CanalB… ou ailleurs. Ailleurs ? Oui, Arthur travaille à l’étranger depuis 2015 mais participe toujours à l’émission. À l’heure d’Internet, ils n’ont pas hésité à tenter le coup ! S’adapter, rester soudés malgré les aléas de la vie et la musique au centre de tout… Est-ce la bonne formule pour garder sa passion intacte ? Pour le savoir, le mieux est de pousser les portes du studio. Marion et Yannick ont justement accepté de répondre à quelques questions pendant leur émission. Des instants volés en direct, entre deux prises d’antenne.

1 – Est-ce le Metal qui vous a amené à faire de la radio ?
Yannick : oui, on a commencé en 2005 avec Olivier. Sur Canal B, avant nous, il y avait l’émission Metalik Park. Olivier m’a proposé de voir s’il était possible de reprendre leur créneau. Il a contacté la station et Yvan Penvern nous a laissé notre chance. Après une formation technique express dispensée par Yann Barbotin, nous avons fait deux essais d’émission « off », puis il nous a dit « c’est bon ». Ça fait bizarre, ça fait déjà 14 ans.
Marion : le Metal et l’amitié aussi. En 2015 les gars m’avaient proposé de faire un test pour lequel j’avais freiné des quatre fers. Je n’avais jamais fait de studio avant ça. Et j’y suis toujours…

2 – Qui est là depuis le plus longtemps ?
Yannick : Olivier et moi. Tu peux mettre Olivier en avant parce que c’est lui qui est à l’origine du projet.

3 – Un mot pour décrire Metal Injection ?
Marion : apéro.
Yannick : plaisir.

4 – Comment préparez-vous vos émissions ? Qui fait quoi ?
Yannick : Arthur, Olivier et moi, on a une playlist qu’on remplit chacun notre tour. Une fois que c’est fait, je récupère les fichiers. On démarche aussi les labels pour enrichir la programmation. On fait tout à distance, sur Internet. Au début, on se retrouvait le jeudi soir mais on a arrêté, c’était la zone.
Marion : Lorsqu’on reçoit des groupes pour les spéciales, c’est pour moi. La partie interview, c’est ce que je préfère.

5 – On met forcément de soi quand on fait de la radio ?
Yannick : oui, déjà parce que ça prend du temps. Il faut de la rigueur, de la discipline. Quand on prépare l’émission, tout est plus ou moins calé mais il faut toujours prévoir une marge. On s’adapte. Parfois, on passe la moitié des morceaux et c’est pas grave. On se laisse porter par ce qui se passe ici, surtout lorsque nous recevons des invités.
Marion : oui, forcément. On est là parce qu’ on a envie de partager. On se bouge sur les concerts, on cherche à faire découvrir de nouveaux morceaux, de nouveaux groupes, on y consacre du temps. Avec le boulot, c’est pas toujours simple mais nous sommes contents de nous retrouver pour faire ça ensemble.
Yannick : et pour tout vous dire, dans le Classique de la Semaine, je mets toujours un morceau que j’aime, issu de ma discographie personnelle. Je le fais depuis le début.

6 – Aujourd’hui, impossible de faire de la radio sans réseaux sociaux ?
Marion : c’est difficile de faire sans, c’est vraiment un média complémentaire.
Yannick : ça aide à faire connaître l’émission. C’est aussi comme ça que les groupes nous contactent et que les labels repèrent ce qu’on passe. C’est pratique. Avant, on faisait tout par mail et c’était plus long.

7 – Est-ce que vous écoutez d’autres émissions radio ? Avez-vous des contacts avec l’équipe de Rennes to the Hills ?
Yannick : je suis un vilain petit canard, je n’écoute jamais la radio. Quand j’étais plus jeune j’écoutais Radio Méduse, Punch FM et même Radio Abeille, des radios locales du pays de Lorient. Sur Radio Méduse, il y avait une émission Metal : Metal Invasion.
Marion : pas beaucoup. Parfois RTL2, Hotmix radio Metal.

8 – En vingt ans, la scène Metal a beaucoup évolué en France. Que pensez-vous du Hellfest d’aujourd’hui ?
Marion : ça fait plusieurs années que j’y vais. J’ai fait une pause en 2018 parce que j’avais l’impression de voir toujours la même prog. J’y retourne car ça reste un beau festival et l’occasion de passer un bon moment avec les potes.
Yannick : j’ai fait quasi toutes les éditions de 2006 à 2012. J’aimais beaucoup, autant pour la prog, que le prix et le public. Et puis, quand ils ont changé de site, c’est devenu cher et c’était impossible d’acheter un billet sans s’y prendre très à l’avance. C’est devenu une kermesse et ça ne s’adresse plus à des passionnés. Il y a des gens qui y vont et qui ne connaissent même pas les groupes qu’ils vont voir. Ils y vont parce que c’est bien d’y aller et de pouvoir dire « j’y étais ». Ce n’est pas ma conception des choses.

9 – Et le Motocultor ?
Yannick : j’y suis allé une fois en 2015 et c’était vraiment très bien. Le festival est à échelle plus humaine que le Hellfest. T’es pas obligé de te garer super loin et de marcher 30 ou 40 minutes pour te rendre au pied d’une scène.
Marion : j’y étais avec Yannick. On y retourne cette année. Là-bas tu n’es pas dans le stress et tu te sens chez toi…

10 – Un ou des label(s) que vous soutenez ?
Yannick : Pas particulièrement. Cependant, Legion of Death, c’était vraiment de l’underground. Il y a aussi Impious Desecration Records, c’est rennais. En gros label, il y a Osmose, ils signent des groupes de qualité en Death et en Black Metal.

11 – Et des groupes ?
Yannick : il y a Season of Tears, Darwin, Sideburn, HexecutorEt aussi, Retentum Curiae, le groupe n’existe plus. Leur dernier concert était le 666 (6 juin 2006) au Mondo Bizarro. J’ai encore le T-shirt. Par définition nous sommes là pour aider à la promotion de tous les groupes qui veulent bien nous rendre visite.
Marion : il y a aussi Mantra.
Yannick : oui, Mantra. Ils sont d’ailleurs venus il n’y a pas longtemps.

12 – Pas de Metal Injection sans scène locale, vous êtes d’accord avec ça ?
Marion : l’objectif est de valoriser la scène locale, alors oui. C’est aussi la politique de CanalB.
Yannick : on annonce les concerts des groupes du coin toutes les semaines.

14 – Trois groupes que vous écoutez ?
Marion : Hypocrisy, c’est le premier groupe que j’ai vu sur scène. C’est celui qui a tout fait. C’était à l’Antipode, j’avais 15 ans. Je mettrai aussi Rammstein. Et pour finir Solstafir, ça me détend, j’aime leurs imperfections et leur côté barré.
Yannick : Mötley Crüe, c’est obligé. La première fois que je les ai vu dans un magazine, je me suis dit : « C’est ça que je veux faire plus tard ». Alice Cooper aussi. Quand je l’ai découvert, j’étais en C.M.1. C’est mon frère qui l’écoutait. Et forcément le premier album des Guns N’Roses. Et il y aussi Motörhead, je ne peux pas oublier Lemmy.

15 – Qui rêvez-vous d’interviewer ?
Yannick : il est mort, c’est Lemmy. Nikki Sixx aussi, il a un discours qui me plaît bien. Il a été déclaré mort cliniquement et il est revenu… Il a eu une vie qui ne ressemble à personne.
Marion : Cory Taylor, le chanteur de Slipknot. Ou bien Mike Patton, le chanteur de Faith No More pour son travail très abouti artistiquement.
Yannick : il y a aussi Alice Cooper !
Marion : ah oui, Alice Cooper !

Caroline Vannier
Benjamin Vannier

Sur le Web :
https://www.facebook.com/Metalinjectionfr/
http://www.canalb.fr/?fbclid=IwAR1fhBiRWX0wTqVnjuSsJh91XzOx-f8MsVujUakLA7L6Y8ehJA4E29vP0-0

Flav, musicien… et programmateur au Bar’Hic (juillet 2019)

Le Bar’Hic va fermer… Triste nouvelle mais c’est bel et bien ce qu’on entend depuis quelques semaines. Situé tout en haut de la place des Lices, le bar est un lieu bien connu des amateurs de Rock, Metal, Punk, Blues et Électro à Rennes. Alors forcément, une telle annonce inquiète pas mal de monde. Mais qu’en est-il vraiment ? Simple changement de nom ou arrêt définitif des concerts ? Exit les rumeurs ! Le mieux est de se rendre sur place et de rencontrer celui qui gère la prog du caf’con’.

« Oui », confie-t-il. « Tout va changer ici. Il y aura toujours des concerts, une partie de l’équipe reste mais le nom, la déco et la dynamique ne seront plus les mêmes. Il y aura un autre programmateur à partir de septembre. » Flavien s’en va mais son travail ne sera pas passé inaperçu. Bien au contraire. En moins d’un an, l’ex barman s’est fait un nom. Groupes, tourneurs, asso… son carnet d’adresses est bien rempli et c’est mérité : « Marion était là avant moi. C’est elle qui a commencé à mettre tout ça en place. » Quoi qu’il en dise le public et les musiciens apprécient la qualité de sa prog et la sincérité de sa démarche. Son atout ? Mettre en avant des formations en qui il croit : « Darcy, Rataxes, 22 Longs Riffs… Après, il y en a eu plein des groupes que je voulais faire jouer ici et qui sont venus. Gros coup de cœur quand même pour Em Shepherd, un groupe nantais de rock électro jazzy. C’est monstrueux ce qu’ils font : un son d’une propreté hallucinante. » Flav est là depuis seulement dix mois mais il sait de quoi il parle. Pas étonnant, avec les deux pieds dans la musique depuis l’adolescence, il est loin d’être un novice : « j’ai commencé la batterie à quatorze ans mais le virus m’a pris entre huit et dix ans. Mes grands-parents avaient MTV et un jour, j’ai vu un tout jeune batteur faire un show. Je me suis tout de suite dit que c’était ça que je voulais faire. Au collège, j’avais déjà un pote qui jouait de la zik et j’ai suivi. Mes parents m’ont toujours soutenu et ils le font encore aujourd’hui, j’ai beaucoup de chance. » Depuis ses quatorze ans, il ne lâchera rien. Après le bac, il passe une licence en Musicologie et intègre l’école Agostini à Nantes : « la licence m’a ouvert à d’autres horizons. J’ai appris à écouter la musique. » Très vite, il joue en groupes mais c’est à la Fac qu’il fera des rencontres décisives : « Avec Gus – chanteur/guitariste chez Sîn –, on était dans la même promo. On a créé un premier projet qui n’a pas tenu mais on en a remonté un autre en 2016 : Sîn. » Les trois musiciens enchaînent les concerts et signent quelques belles dates comme à l’UBU ou au Ferrailleur. Entre Metal, Stoner et Rock, leur son se fait une place dans le milieu de l’underground. Ils préparent actuellement un album qui devrait sortir pour la fin de l’année 2019.

Quand Flav parle de musique, il y a beaucoup de passion dans ses propos mais le boulot n’est jamais loin. Développer sa propre approche de l’instrument passe forcément par une excellente maîtrise technique. Devenir un bon musicien prend du temps et il n’est pas avare de compliments quand il cite ceux capables de l’être : « Alex Jadi, un batteur avec un énorme cursus. Il est terrible sur scène. Il joue dans Fange et Swaarm. Il est au-dessus de tout le monde et c’est une crème. »

Flav’ poursuit sa carrière de batteur dans Sîn et il n’abandonne pas la prog. À la rentrée, il intègre l’équipe du Dejaze. Une nouvelle aventure commence pour lui… et pour pas mal de groupes qui espèrent le suivre. Il l’assure, l’éclectisme de sa programmation, il tient à la garder. « Je veux, par exemple, continuer à travailler avec des asso de Hardcore. C’est une scène très active à Rennes. » Il s’arrête un moment puis poursuit : « je les cite eux mais il y a plein d’autres, des groupes ou des asso, dans des genres très différents à Rennes et ailleurs. L’erreur serait de se fermer. C’est toujours mieux d’accorder des dynamiques que des styles.» Diversifier, refuser l’homogénéité… Serait-ce la clé d’une soirée réussie ? Une idée à méditer.

Caroline Vannier

Sur le Web :
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Un aller simple pour Rennes (janvier 2019)

Quelques années déjà que Barrel Kick arpente les salles de concerts. Un groupe aux airs de Rancid et de Dropkick Murphy’s qui apporte une note américaine dans le paysage punk-rock français. Leur recette ? Une technique rodée, de l’efficacité… et une bonne dose de complicité. Il faut dire que ces quatre-là se connaissent depuis un moment mais il a fallu être patient pour les voir jouer ensemble. Occupés chez Collaps Machine, Happy Kolo, Strike Back, Sherkan, Reckless Bomb, Disturbance… Ils ont marqué les mémoires de la scène locale mais pas que… leur son s’est baladé un peu partout. Vingt, presque trente ans pour certains à avaler les kilomètres… Oui, ils en ont usé des cordes et des baguettes dans les caf’conc’ et les festivals. Des gars bosseurs et généreux qui transmettent la même énergie devant dix ou deux cent personnes. Devenir un bon musicien, ça passe aussi par là : se confronter à un public, s’adapter, tester ses limites… En bref, sortir de la salle de répète : un vécu qui donne l’aisance nécessaire à la maîtrise d’un instrument. La scène serait-elle la meilleure des écoles ? Du côté de Barrel Kick, ça ne fait aucun doute ! L’appel du live, toujours et encore… Mais d’où sont-ils partis ? Pour trois d’entre eux, l’histoire commence en banlieue parisienne. Là-bas, ils se croisent en studio. La musique dans la capitale, ils y ont goûté ensemble et ils ne mâchent pas leurs mots : peu de salles, une liberté limitée, pas d’espace pour les asso… Pour faire du punk ou du metal, il faut bouger et c’est ce qu’ils font. Avec leurs groupes respectifs, ils découvrent des lieux hors normes, des endroits qui favorisent le Do it Youself… Des itinéraires plus ou moins connus… et un jour, une route qui les mène à Rennes : d’abord pour y jouer et plus tard pour y habiter. Leurs bagages, ils les posent ici quasi à la même époque. Un heureux hasard ? Non. Le breton est sans doute un peu punk…

1 – Comment vous êtes-vous connus ?
Thierry : on vient presque tous du 95. C’est la banlieue, pas Paris.
Chris : avec Ben, ça fait vingt ans qu’on joue ensemble. Depuis 1996. On croisait Thierry dans les lieux de répètes dans le 95.
Jex : moi, je les ai connu beaucoup plus tard. Je viens de Bressuire dans les Deux-Sèvres.

2 – Avant, ça ressemblait à quoi la scène punk-rock à Rennes ?
Thierry : en 2006, je venais souvent jouer ici avec mon groupe Happy Kolo. Tout le monde croyait qu’on était bretons à l’époque. Pour faire du punk-rock, il fallait aller à Rennes.
Jex : je suis arrivé en 2002 à Rennes et on venait surtout au Mondo Bizarro. On a monté Collaps Machine en 2005, c’était mon premier groupe à Rennes.
Chris : j’ai rencontré une bretonne et voilà… Ma batterie est arrivée avant moi. Avec d’autres gars, on avait programmé de faire un groupe de reprises.
Ben : ma femme est bretonne. Je suis arrivé six mois après Chris, en 2010. Je connaissais Boris des Bananes Metalik, on a monté le groupe Reckless Bomb avec lui et Chris.

3 – En un mot, la scène rennaise… quelle différence avec Paris ?
Thierry : vivante.
Ben : ambiance.
Chris : la seule qui perdure. Tu sais, le seul endroit qui bougeait à Paris, c’était la Miroiterie et aujourd’hui, c’est fermé. C’est pour dire.

4 – Chris, aujourd’hui, Barrel Kick… Hier, Sherkan, Chouch’nMolotov’, Death & Squad, Reckless Bomb, Strike Back… Beaucoup de groupes, parfois plusieurs en même temps, comment on gère un tel planning ?
Chris : c’était plus possible. J’étais toujours sur les rotules et j’avais un max de tendinites. J’ai eu trois groupes max en même temps avec des répètes les mardis, mercredis et jeudis. Les concerts les vendredis et samedis… Une fois, j’ai eu six concerts en neuf jours.

5 – Thierry, tu as toujours privilégié un son punk-rock ?
Thierry : non, à la base je suis metalleux. Je suis arrivé dans le punk-rock avec mon premier groupe.

6 – Thierry, et si je te dis Lemmy ?
Thierry : il est tatoué sur ma cuisse.

7 – Ben, quand as-tu commencé la guitare ?
Ben : à 22 ans. Je voulais faire de la musique avec des potes et ça a commencé comme ça, tout simplement.

8 – Jex, on te connaissait guitariste, comment es-tu passé au chant ?
Jex : c’est Ben de Collaps Machine qui devait être au chant mais il n’est pas resté, le son ne correspondait pas à son type de voix. À la base, j’avais écrit deux premières chansons de punk-rock au printemps 2014 (Son By Blood, My Hell) et quand Ben est parti, je suis passé au chant, ce qui m’allait bien car les textes de ces chansons sont très personnels. Mais j’avais déjà été chanteur dans un groupe de post-hardcore qui s’appelait Woman Only en 1999, on chantait à quatre.

9 – Trois groupes à conseiller à quelqu’un qui n’écoute pas de punk ?
Jex : Dropkick Murphys.
Chris : Rancid.
Thierry : The Clash.

10 – Pas de punk-rock sans scène ?
Tous : ouais, carrément.
Chris : il faudrait même que des albums live.

11 – L’aventure Barrel Kick, ça a commencé comment ?
Jex : Ben a remplacé Dibos à la basse chez Collaps Machine pendant quelques mois. Après Collaps, on s’est dit que ça serait bien de remonter un groupe ensemble.
Chris : tous nos groupes étaient morts, c’était le moment où jamais de monter un projet commun. Ben est passé à la guitare et Thierry à la basse.

12 – La scène locale aujourd’hui ?
Chris : ça bouge. Tous les groupes qui débutent ont une chance de jouer. Le Bar’Hic, la Fontaine de Brocéliande… on a de la chance. Respect à tous ces gens.

 

Caroline Vannier

Sur le Web :
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