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Des histoires qui se vivent

Catégorie dans Musique

Catherine, un regard sur la scène Rennaise (juin 2020)

Rennes, en quelques mots ? « Sa culture, sa taille à échelle humaine et surtout sa musique », répond Catherine sans hésitation. Il faut dire que la cité Bretonne, elle la connaît depuis un moment : « je suis née ici. Après, j’ai vécu 18 ans dans un petit village pas loin. Et comme pas mal de monde, j’y suis revenue pour mes études. » Alors, le jour où elle franchit le pas pour devenir attachée de presse, le faire depuis Rennes a du sens. Certains diront qu’à l’heure des réseaux sociaux, s’établir dans un lieu précis est superflu mais pas pour Catherine : « j’aime bien bosser avec des groupes Rennais parce qu’on a le temps de se voir, de passer du temps ensemble, de tisser des liens. C’est moins facile quand je travaille avec des groupes qui habitent plus loin, le travail se fait de la même façon mais il manque quelque chose. »

Catherine écoute du rock : « David Bowie, Joy Division, Led Zeppelin, The Stooges… J’ai eu une platine vinyle assez tard et j’ai eu envie, dans un premier temps, de redécouvrir les grands classiques du rock quand on me l’a offerte. Quand tu pars de zéro vinyle, tu ressens un énorme plaisir à aller à la chasse aux albums cultissimes pour toi. » Passionnée de musique, elle l’est… mais ce métier, elle ne l’a pas choisi tout de suite. À 37 ans, elle décide de tout plaquer. Un changement d’orientation professionnelle radical : « pendant 15 ans, j’ai fait des sites Internet et je ne voulais plus continuer. Je passais mon temps devant mon ordi à « pisser » du code, comme on dit et le milieu dans lequel j’évoluais n’était pas en adéquation avec mes convictions. J’ai réalisé un bilan de compétences mais c’est en intégrant des équipes de festivals, en commençant à écrire pour Rennes Musique et en rencontrant des gens que jai pensé à attachée de presse. En y réfléchissant, c’est allé assez vite. Tout s’est accéléré quand j’ai interviewé City Kay lors de leur concert aux Trans Musicales, pour Rennes Musique justement. Un des membres du groupe – Yoann Minkoff – sortait un album et ça a commencé comme ça. J’ai quitté mon boulot et je me suis lancée. C’est grâce à lui que tout a commencé. Son album Black & White Blues est magnifique, il m’a ouvert des portes dès le début.»

Mais en quoi consiste ce métier ? Comment se construit un réseau ? Catherine s’occupe de faire connaître les groupes auprès des médias : radios, journaux, webzines, TV locales et nationales… Mais sans carnets d’adresses, impossible d’entrer en contact avec les bonnes personnes… et il y a encore quelques années, elle n’était pas du tout dans le milieu. Elle est pourtant parvenue à se faire une place en peu de temps : « quand j’ai voulu travailler dans la musique, j’ai été bénévole presque partout à Rennes. Je me suis construite un réseau assez vite. Aujourd’hui, je continue seulement avec le Grand Soufflet et l’Antipode. » Et après ? Qu’est-ce qui fait la différence ? Catherine est rigoureuse, efficace et surtout, elle parle bien des musiciens qu’elle défend. Aujourd’hui, sous le nom de These Days, elle travaille avec le festival I’m From Rennes, quelques labels et 4 à 5 groupes par mois… Pas mal de formations rock qui ont eu leur place dans les pages de Rock&Folk, sur le site de la Grosse Radio et même chez De Caunes sur France Inter. Pour en arriver là, elle a acquis une très bonne connaissance du milieu musical Rennais en tant que bénévole mais aussi en étant elle-même « journaliste »…

Catherine écrit pour Rennes Musique, un blog qui fait la part belle à la scène locale. Empruntant le nom de l’ancien disquaire emblématique de la rue Maréchal Joffre, le site traite de l’actualité de ceux qui font la musique : des portraits, des interviews d’artistes mais pas que… À travers les rubriques Comptoir et Label d’été, c’est une ouverture à tout un univers musical dont on ne parle pas forcément : « pendant deux saisons, on l’a fait avec les cafés concerts. Idem pour les labels et c’est fou tout ce qui existe. » Un chantier qu’elle partage avec Anthony B. (le fondateur). Des passionnés qui sont là pour donner un coup de projecteur sur ce qui se passe à Rennes. Depuis cinq ans, certains d’entre eux animent même en parallèle l’émission radio Purple Rennes. Un format hebdo, le mercredi, de 19h à 20h, sur CanalB. Aux commandes ? Catherine, Romain et Benjamin. Toutes les semaines, ils brossent le portrait d’un groupe du coin qui joue toujours en live. Là aussi, il y a un gros boulot de la part de Catherine, c’est elle qui est à la programmation et qui cherche des groupes chaque semaine. Et d’ailleurs, passer derrière le micro, ça se passe comment ? « Je n’avais jamais fait de radio. Quand on te tend un micro au tout début et qu’on te dit, allez vas-y, c’est pas évident. Mais au fur et à mesure des émissions, tu prends tes marques, tu apprends à poser ta voix. » Au total, entre Purple Rennes et Rennes Musique, les souvenirs s’accumulent : « Slift, un de mes coups de cœur mon tout dernier concert avant le confinement. Frustration aussi. Discuter des heures et des heures avec Laeticia Sheriff. Sleaford Mods, une des interviews les plus compliquée à retranscrire. Et bien sûr Dominic Sonic, l’interview qui restera pour moi la plus marquante et le plus beau moment. Il avait tellement à raconter qu’on a poursuivi la discussion dans un bar, après l’avoir reçu dans l’émission. Il y a les spéciales aussi comme Purple Grignou. On l’a fait une fois, l’année dernière, c’est un mix entre nous et la plus vieille émission de CanalB. On croise pas mal d’animateurs tous les mercredis et on a pas le temps de se parler, faire une émission commune permet de passer du temps ensemble. Il y a quelques jours, on a réédité l’expérience avec Metal Injection. Avec l’épidémie de Covid, on a pas eu accès au studio, on a donc investi le Marquis de Sade. »

Pour beaucoup, Rennes a perdu de sa splendeur musicale. Que reste-il des vestiges des années 70-80 ? Peut-on encore l’appeler ville Rock ? Pour Catherine, la question ne se pose pas : « il y a de la diversité. Je découvre toujours de nouveaux groupes. Impossible de s’ennuyer.»

Caroline Vannier

Sur le Web :
https://www.facebook.com/thesedayspressandbooking
https://www.facebook.com/rennes.musique/
https://www.facebook.com/PurpleRennes
http://canalb.fr/purplerennes/podcasts
http://rennesmusique.com/

Big Steph, une des mémoires de la scène punk rock alternative (mars 2018)

Big Steph, on le remarque ! Il a une tronche de rockeur et une carrure à bosser dans la sécu. Un gars qui n’hésite pas à dire ce qu’il pense et qui reste fidèle à son ancrage musical. La musique ? Il a mis le pied dedans tout jeune. Très tôt, il suit ses cousins et découvre la scène punk rock des années 80. Avec des groupes comme Les Rats et Parabellum, il rencontre des gens écorchés, libres et impliqués. L’énergie qu’ils dégagent, il va vouloir la partager. C’est comme ça, qu’il organise ses premiers concerts. Tout d’abord avec des potes, et puis tout seul quand il monte sa propre affaire en Bourgogne : « j’ai eu un bar de début 1991 à 1993, dans le trou du cul du monde. J’avais 21 ans. Je faisais ma prog, je sélectionnais moi-même les groupes ». Il jette un coup d’œil aux affiches près du bar : « à l’époque, pour la com’, on se démerdait autrement : on faisait des pochoirs et des collages. Et après, on passait tout à la photocopieuse. Je crois que j’ai encore des affiches chez moi.»

Big Steph prend ses valises et arrive à Rennes en 1997. Pendant un an, il bosse au Sympatic Bar (en 1998), puis enchaîne des postes à la sécu des salles de concert entre 1999 et 2003. En 1999, il participe même à l’orga du Festival des Résistances « on avait fait des souscriptions grâce au dessin de Vuillemin – créé gratuitement -, ce qui nous a permis de faire des t-shirts et affiches du festoche. Grâce à ça, on a eu des fonds pour pouvoir faire le festival et surtout aussi grâce à Eric Lacote, chanteur des Dileurs, qui avait un très bon carnet d’adresses avec beaucoup de gros groupes comme Zebda, Tryo, Flor del fango…. » En 2002, il entre au Mondo Bizarro, il y restera 16 ans : « au début, j’ai fait de la sécu pour le Mondo sur des grosses dates comme UK Subs, The Vibrators… Et puis, j’ai vu que Bruno était emmerdé, il avait plus de barmans. En mars 2003, j’attaquais le bar. »

Derrière son comptoir, il en a vu des groupes : « ça m’a permis de revoir des connaissances comme Pat Kebra, Géant Vert. » Il évoque aussi, ses potes, ceux qu’ils n’oublient pas « Parabellum, Les Rats… c’est la famille. Schultz, Sven et Patrick Lemarchant… Les mecs, je les ai connus à 15 ans. » Les souvenirs de concerts défilent, on parle d’un soir, à la salle de l’Étage où Schultz – chanteur de Parabellum disparu en 2014 – le salue du haut de la scène. Stéphane est au beau milieu du public, il dépasse tout le monde d’une bonne tête et répond d’un geste amical à son pote : « … c’était mon grand frère », lâche-t-il le regard absent.

Aux côtés de Bruno, Big Steph a aussi vu évoluer des acteurs de la scène locale : « Jo – de l’asso Face to Face – je l’ai connu tout jeune. Il met de sa poche, parfois il se casse la gueule mais il recommence. » Et puis, la conversation s’étoffe, les anecdotes fusent… Big Steph pose ses coudes sur le comptoir et confie : « Oh là ! Les Fishbone ! Il y avait 240 personnes là-dedans, le 15 août. Je me rappelle, c’était Nico de Tagada qui faisait le son. » Le temps de servir à boire à des clients et il revient : « Il y a aussi eu des casse-couilles comme The Distillers en 2002. Ils sont arrivés à la bourre et ils ont joué les stars. »

Big Steph est une des mémoires de la scène punk rock alternative. Dans quelques années, on le verra peut-être à la sécu d’une salle de concert ou derrière le comptoir d’un autre bar à Rennes. Mais ce qui est sûr, c’est que des histoires, il en a en réserve : entre deux services, il pourra lâcher deux ou trois anecdotes sur la scène d’aujourd’hui et d’hier. Et un rêve fou, il en a un ? : « J’aime bien faire la bouffe… Avec ma femme, on aimerait bien ouvrir des chambres d’hôtes à thèmes. » Le punk rock ne meurt jamais. Une devise que Stéphane n’a pas besoin de dire, il la porte en lui.

Caroline VANNIER

Jack, animateur et fondateur de l’émission Rennes to the Hills (février 2020)

Pas facile d’avoir un véritable avis sur la musique. En dehors du simple « j’aime » , « j’aime pas », avancer un argument qui tient la route n’est pas une évidence pour tout le monde. On met toujours de soi dans un jugement mais une opinion construite donne de la valeur à une critique. D’accord… mais la musique a-t-elle besoin des autres pour exister ? Oui… Sauf cas très particuliers, un morceau a vocation à être partagé et savoir en parler met en valeur le travail des groupes. Jack est de ces passeurs. Un passionné, devenu un intermédiaire entre le public et les artistes. Animateur chez Rennes to the Hills depuis presque sept ans, il repère, décortique mais surtout participe à la découverte de musiciens issus de la scène professionnelle et amateur. Mais qu’est-ce qui l’a mené à faire de la radio ? Semaine après semaine, comment prépare-t-il ses émissions ?

Il y a forcément un début à tout. Pour Jack, le virus de la musique l’a pris très tôt : « la première claque, c’était avec Discovery de Daft Punk. J’avais emprunté le C.D. à la bibliothèque et j’écoutais en boucle le morceau Aerodynamic. Après, j’ai eu ma période Neo-Metal mais dès 13 ans, j’ai commencé à m’intéresser au Death Melodique avec le groupe Suédois Soilwork. À cette époque, Lordi jouait aussi à l’Eurovision et j’ai trouvé ça fou qu’ils gagnent.» L’enfance façonne de bien des manières… De cette période, il retient ses découvertes musicales mais aussi un surnom qu’il porte aujourd’hui à la radio : « mon vrai prénom est Mathieu mais on m’appelle Jack depuis que j’ai dix ans. »

Pour en parler, écouter de la musique est essentiel… mais pour la comprendre, faut-il savoir en jouer ? Disons que ça peu aider… « J‘ai fait de la guitare. C’était pas du Metal mais plutôt de l’Alternatif. Le groupe n’a pas tenu, on s’est séparé parce qu’on partait tous faire nos études ailleurs. C’est à ce moment que j’ai commencé la radio », explique Jack. Il débute comme chroniqueur sur le temps du midi pendant une saison mais très vite, il monte son propre projet : «  il n’y avait pas d’émission dédiée au Metal à la Fac, j’ai déposé une demande et c’est comme ça que Rennes to the Hills a démarré. C‘est à cette période que j’ai rencontré Swann du groupe Hipskör. Il a fait partie de la première équipe de Rennes to the Hills avec Clément, Anaïs et Pablo.» Musicien et présentateur ? Et oui, en coulisses ou dans les salles de concert, les rôles se mêlent : les acteurs de la scène locale portent parfois plusieurs casquettes.

Après toutes ces années, la motivation est-elle toujours la même ? Comment se prépare une émission hebdomadaire ? « On est en direct le mardi soir, de 21h00 à 22h00. On arrive vers 20h30 mais je t’avoue qu’on privilégie une ambiance détendue. J’ai toujours insisté pour qu’on se fasse plaisir et que tout le monde participe, y compris la personne qui gère la technique. Il a son micro et il intervient quand il veut. » N’empêche, quand on les écoute, on se rend compte que les chroniqueurs maîtrisent parfaitement leurs domaines : « j’ai toujours voulu taper large dans les styles de Metal. On passe des trucs qu’on aime bien, même si c’est pas récent. On parle aussi des groupes et des asso locales. » Et c’est du boulot… Rennes to the Hills ne prend quasi pas de vacances : « l‘été, c’est une période riche en actualités. On peut pas passer à côté. Il y a les festivals à couvrir comme le Hellfest et le Motocultor. On va sur place pour les interviews. Après, en dehors des gros festivals, on sort peu du studio. On a quand même déjà fait 8 heures de live pour l’anniversaire du Mondo Bizarro. Un très bon souvenir mais techniquement, c’était compliqué. »

Jack a une très large connaissance du monde de la musique. Il va voir pas mal de concert mais il bosse aussi en tant que Runner Artiste, Merch Guy et Roadie. Un taf complet qui oblige à être sur tous les fronts : du merch, au matos, en passant par la conduite… Il a commencé comme bénévole et puis, un jour, Rage Tour l’a contacté pour accompagner un groupe en tournée : « Columbine, du rap. Rien à voir avec le Metal mais j’ai vraiment adoré. On est parti 4 mois et on a traversé pas mal de pays. Je repars en mars avec The Lords of Altamont

Jack sait parler des musiciens. Un animateur curieux qui a les yeux qui brillent quand il évoque les groupes qu’il soutient : des formations – pour la plupart – issues de la scène Metal, Rock et Alternative.

La musique…

Une passion qu’il a su garder intacte depuis ses 13 ans. C’est beau ça… et plutôt rare ! N’hésitez pas à l’écouter ! Rennes to the Hills, ça se passe tous les mardis soirs avec Jack, Julien, Vincent, Elisa, Pierre et Elliot.

Caroline Vannier

Sur le Web :
https://www.c-lab.fr/emission/rennes-to-the-hills.html?fbclid=IwAR2jVF3YTqqgnXjaB1_lx4UxFaZleky0HnAQRPZETE7S-O3nf14rCJPEyaU
https://www.facebook.com/rtth35

Kemar, chanteur de No One is Innocent

No One is Innocent est un groupe emblématique des années 90. Des textes engagés, un son neuf, une énergie qui explose sur scène… À une époque où la fusion est reine, ils font un démarrage remarqué. Ils ont à peine vingt ans quand ils sont programmés aux Transmusicales de Rennes en 1993 (deux ans après Nirvana). Après ça, tout s’accélère… L’année suivante, ils signent leur premier album : No One is Innocent puis l’excellent Utopia en 1997. Deux réussites qui allient maîtrise technique et renouveau artistique : « La Peau » et « Nomenklatura » sont des morceaux si percutants qu’ils resteront d’actualité pour au moins les vingt années à venir. Mais quand on a connu de tels débuts, comment continuer à se construire en tant que musicien ? En 2019, le groupe est toujours là, assumant deux vies. À part Kemar (au chant), les membres de No One ont changé de visages mais le line up actuel est le même depuis quinze ans. Une stabilité qui aboutit aux très bons Frankenstein et Propaganda. Guitares en avant, ambiance rageuse… L’efficacité des riffs et de la rythmique portent avec authenticité les textes de Kemar. Une approche sans concession qui prend tout son sens en live. Et il est vrai que le frontman ne lâche rien, plus que jamais fidèle à ses engagements. Une ligne de conduite qui contribue à renforcer l’identité forte de No One. Mais qu’est-ce qui fait que la passion est toujours là ? Comment cultiver cette énergie sur scène ? Le samedi 9 novembre 2019, quelques heures avant son concert à Chateaugiron, Kemar a accepté de répondre à une dizaine de questions. Un entretien court mais qui apporte de belles réponses. La parole est donnée à un artiste indépendant qui trace sa route.

1 – Pas de musique sans message politique ?
Non, pas forcément. C’est pas parce que l’image de ton groupe est très engagée dans le texte que tu ne dois faire que ça. C’est aussi une bouffée d’oxygène de faire autre chose. Dans Frankenstein, il y a par exemple la chanson « Ali »: on prend beaucoup de plaisir à la jouer sur scène.

2 – Toujours fans des Sex Pistols ?
Ouais, ça reste un groupe important. Notre groupe vient de là (le nom du groupe est le titre d’un single des Sex Pistols). On aime le côté foutraque des Pistols mais on est plus dans la veine de The Clash pour la carrière. Les Pistols, ils ont marqué l’histoire ! Ils ont quand même sorti un album intemporel.

3 – Le son studio de Nomenklatura sur Utopia est très spécifique. De quelle façon la jouez-vous sur scène ? Comment l’abordez-vous à deux guitares ?
Il y a toujours une boucle derrière et une guitare qui reproduit le plus fidèlement possible le son de cette cithare électrique : celle qu’on avait utilisé pour l’enregistrement. L’idée est de rester le plus proche possible de l’originale.

4Sur vos derniers albums, le son est plus brut, plus incisif. Comment travaillez-vous aujourd’hui ? Quel est le point de départ d’une compo ?
Le groupe est stable depuis quinze ans. À part Popy à la guitare, ce sont les mêmes personnes. Cette stabilité, c’est aussi ce qui fait la force des deux derniers albums. On a essayé beaucoup de choses. Il y a un album qui a un peu moins marché que les autres mais ça nous a permis d’avancer. On s’est toujours demandé ce qui est bon pour le groupe : on se retrouve autour de ça.

5 – À l’international avec des groupes comme Nirvana, Rage Against the Machine ou encore Snot… En France avec vous, Lofofora, Silmarils, Mass Hysteria… Dans les années 90, la fusion et le grunge explosaient. Vingt-cinq ans après, quel regard portez-vous sur ces années ?
C’était des années géniales. Une créativité hors du commun en terme de son, d’attitude, de textes… La musique, c’est cyclique. Cette période, elle révoltait, elle enthousiasmait.

6 – Tes textes sont clairs, engagés et sans concession. Est-ce que tu penses à ta façon de les interpréter en les écrivant ?
Oui, clairement. Ça va de paire. C’est un gros travail d’écrire en Français. Tout doit être cohérent. J’écris des textes seul et avec mon pote Emmanuel de Arriba. Il faut absolument le citer, c’est quelqu’un d’important pour moi. L’écriture, c’est une étape exigeante et tant mieux. Il faut que la musique nous raconte une histoire.

7 – Techniquement, la chanson La Peau est un régal en terme de ruptures et de contretemps. Est-ce que vous vous permettez d’improviser certains passages en live ?
Non, c’est un morceau qui se suffit. Depuis un moment, il y a quand même une extension en concert mais c’est tout.

8 – La jeunesse emmerde le Front National, c’est encore vrai aujourd’hui ?
On s’en fout si c’est vrai ou pas. Pour nous, ce sont nos pires ennemis. Les Le Pen, ce sont des gens qui existent toujours mais on oublie qu’ils sont aux portes du pouvoir. Aujourd’hui, la jeunesse s’est scindée en deux. Certains s’impliquent dans l’écologie et c’est très bien mais il ne faut pas oublier les autres combats.

9 – En juin 2015 sort l’album Propaganda avec le titre Charlie. Le 13 novembre, la salle du Bataclan est frappée par les attentats. Le 30 novembre, vous faîtes un concert spécial avec Coco (dessinatrice chez C.H.) et Marika Bret (journaliste chez C.H.). Qu’est-ce qui se passe à ce moment-là ? En terme d’écriture, comment trouver les mots justes pour combattre l’impensable ?
On s’est dit que si on écrivait pas une chanson à ce moment-là, c’était une faute professionnelle. On se devait d’être là.

10 – Reuno s’en va, Kemar arrive… Vos impressions sur les premiers concerts du Bal des Enragés ?
C’est l’extase. C’est un joyaux ce collectif ! Une bande de gars sans égaux qui jouent leur son pour les autres. Hier, c’était la dernière de l’année et c’était émouvant. Je peux te l’assurer, on a eu du mal à se quitter.

Voight Kampff

Voight Kampff a ce petit truc en plus qui fait qu’il ne ressemble à aucun autre groupe. Des musiciens passionnés qui n’hésitent pas à réenregistrer leurs morceaux en studio quand ils remarquent « qu’ils ne vont pas dans le bon sens ». Des fans de science-fiction et de Metal qui se retrouvent pour développer un projet hors norme : faire un album basé sur l’œuvre Blade Runner. Des artistes courageux qui un an après le décès de leur guitariste, Mathieu Broquerie, remontent sur scène. Quelques heures avant leur concert du vendredi 13 septembre à l’Étage (Garmonbozia / I’m From Rennes), ils ont accepté de répondre aux questions de Metalorgie. Entre échanges autour de K. Dick et d’Azimov, les musiciens sont revenus sur la sortie de lexcellent Substance Rêve (label Sliptrick Records) : une réussite tant au niveau technique, qu’artistique. Un album cohérent et pointu qui laisse la part belle à l’imaginaire. Mais avant d’en savoir plus, une petite explication s’impose… Voight Kampff est la machine utilisée par les Blade Runners : policiers en charge d’arrêter et de déterminer si un individu est un répliquant ou non. Il faut croire que l’inspiration ne s’est pas tarie avec le temps… comme quoi, un simple nom de groupe peut se révéler porteur d‘un véritable projet.

1 – Motocultor, Hellfest, les 15 ans de Garmonbozia… Être sur un label donne-t-il accès aux grosses scènes ?
Z : pas du tout. C’est plutôt Garmonbozia qui nous a mis dans la prog des 15 ans et celle du Hellfest. Pour le Motocultor, on a gagné un tremplin au 4BIS. C’est comme ça qu’on s’est retrouvés à jouer là-bas.
Gaël : ça nous aurait peut-être pris plus de temps en autoprod.
Z : on ne joue pas beaucoup. Pas plus de 10 dates par an mais c’est un choix. On ne joue pas souvent mais ce sont toujours de belles scènes, dans de bonnes conditions.

2 – La pochette de l’album est signée Caza. Comment s’est concrétisé le projet ? A-t-il écouté les morceaux enregistrés en studio avant de vous proposer un visuel ?
Gaël : avec Mathieu, on cherchait mais ne trouvait pas un visuel qui nous correspondait. On l’a contacté, tout simplement. Et ça a collé tout de suite.
Z : il nous a envoyé 8 croquis avec le titre des morceaux. On lui en a précommandé 2 qu’il a enrichi et finalisé. C’est quelqu’un de très accessible. On est tous fans de S.F. et on voulait retrouver cette ambiance sur la pochette de l’album.

3 – Pyromancer, tu as remplacé Oliv à la batterie. Comment as-tu posé ton jeu ? As-tu pris en compte ce qu’il a fait sur l’album ?
P : les deux. J’ai beaucoup écouté l’album. J’ai gardé des éléments de la vision d’Oliv mais je voulais aussi mettre ma patte dans les morceaux. On a pas du tout la même façon de faire de la batterie. J’ai un jeu plus chargé, je remplis plus les espaces. Oliv a une approche plus épurée. J’ai eu beaucoup de liberté, les gars m’ont laissé faire ce que je voulais.
Z : il est aussi guitariste. Et ce qu’il a fait avec nos morceaux est très bon.
Moi : tu joues de la guitare dans quel groupe ?
P : dans Architect of Cult.

4 – Votre musique est à la fois très technique et hypnotique, comment composez-vous ? Dans un même morceau, faites-vous le choix de moment purement instru et d’autres plus propices à poser la voix ?
Gaël : pour le deuxième album, les morceaux ont été composé par Oli, Mathieu, moi et Z. On a tous participé.
Z : c’est pas une science exacte. Quand on se retrouve pour travailler ensemble, il y a des erreurs qu’on garde parfois.

5 – Vous n’habitez pas les uns à côté des autres, comment travaillez-vous ?
Z : c’est pas facile. On travaille beaucoup à la maison avec Cubase. On essaie de répéter au mieux une fois par mois. C’est clair qu’on ne peut pas arriver en répète sans connaître les morceaux.
P : on s’est bien trouvé aussi. On a vraiment de la chance que ça marche.

6 – Le nom du groupe, la thématique de l’album… L’univers de Philippe K. Dick est plus qu’une source d’inspiration pour vous. Les sujets développés par l’auteur sont-ils inépuisables ?
Gaël : son imaginaire est à son image. C’est fou quand même, il a imaginé des choses qui sont en train de se passer en ce moment. Après, sur Blade Runner, je pense qu’on a fait le tour avec l’album.
Z : on pourrait s’inspirer d’autres auteurs de S.F. comme Azimov.

7 – Les adaptations cinématographiques de K. Dick comme A Scanner Darkly ou Blade Runner (R. SCOTT et VILLENEUVE) sont-elles aussi sources d’inspiration dans votre travail ?
Z : le film de R. SCOTT, clairement oui. Il y a plusieurs lectures à voir. Celui de VILLENEUVE, j’ai bien aimé : l’esthétique, les acteurs, Ryan Gosling… c’était vraiment super mais la musique moins. Après, c’était pas la même magie, je ne le découvrais pas avec mes yeux de mino.

8 – Question K. Dick : selon vous, qu’est-ce que le réel ?
Z : oh là comme ça, c’est pas simple comme question.
Gaël : on a tous des perceptions de ce qui se passe. Par exemple, si j’étais à l’extérieur de cette scène, de ce qui se passe en ce moment précis, ça serait plus simple. Je serai plus objectif. En fait, il manque une dimension pour le définir.
Z : c’est pas mal comme réponse.
P : Ouais, c’est bien.

9 – En réalité, l’album a été enregistré deux fois. Vous n’étiez pas satisfaits de votre travail sur la première version, alors vous avez décidé de tout refaire. Une décision très courageuse. Faut-il arriver à une certaine maturité musicale pour être capable d’avoir ce recul ?
Z : non, c’est surtout le fait qu’on ne sorte pas beaucoup d’albums. On voulait quelque chose qui nous plaise. On a retravaillé le processus d’enregistrement.
Gaël : quand on travaillait sur la première version, on avait même l’impression que ça nous échappait.
Z : on savait que ces morceaux-là valaient mieux.

10 – Un groupe que vous écoutez toujours ?
Z : Death, l’album Symbolic.
P : Death, pareil.
Gaël : Coroner, n’importe quel album.

11 – Un mot sur l’hommage rendu ce soir à Mathieu Broquerie ?
Z : on est touché par cette attention. Pour nous, c’est encore délicat. Ce soir, on va penser à lui. C’était quelqu’un qui était vraiment très actif sur la scène rennaise.
Gaël : il arrivait toujours à bonifier les gens. C’est pas parce qu’il n’est plus là que je dis ça mais avec lui, on avait l’impression d’être meilleurs. On a l’impression d’avoir une partie de nous-même.

12 – Qu’est-ce qu’on vous souhaite pour la suite ?
Z : de bons concerts et des enregistrements. Jouer. Faire de la musique encore.
Gaël : de bons concerts avec Clément aussi. Il s’est beaucoup investi pour apprendre les morceaux.

Les Tambours du Bronx et Reuno en mode WOMP

Découvrir les coulisses d’un concert, c’est comme braver un interdit. On ne sait pas trop si on a le droit d’être là, alors on se fait tout petit pour ne pas gêner… et on profite du moment. Mais comment retranscrire sur papier ce qui se passe en backstage ? Quels éléments retenir pour écrire un article ?
Traiter l’aspect technique peut se révéler compliqué. Le matériel, les balances, la sonorisation… Pour s’atteler au sujet, il faut s’y connaître et être capable de vulgariser ses propos. Ce n’est pas à la portée de tout le monde… Reste l’ambiance. Traduire l’atmosphère avant un show est sans doute la meilleure approche. Mais là encore, ce n’est pas si simple… Raconter cet instant de flottement avant l’arrivée sur scène est hasardeux. Rendre compte de l’état d’esprit des musiciens, savoir ce qui les pousse à se dépasser soir après soir… Rien de cela n’est visible de l’extérieur. Tout se passe à l’intérieur du groupe et le badaud est bien incapable d’interpréter quoi que ce soit. Pour ne pas commettre d’impairs, la meilleure solution reste l’échange. L’interview est inévitable…. mais encore faut-il l’obtenir…
Les Tambours du Bronx ont accepté de se prêter à l’exercice lors de leur passage à Rennes. Présents depuis plus de trente ans sur la scène française et internationale, ces percussionnistes urbains se sont fait un nom. Véritables orfèvres, ils orchestrent des show à l’énergie brute. Des cogneurs, qui une fois lancés, ne lâchent rien ! Pour faire vibrer les bidons, pas moyen de tricher : le geste est ample, le visage est expressif… Ils mettent du cœur à l’ouvrage sans jamais faiblir. Une recette imparable qui rend leur jeu unique. Ce vendredi 5 avril, vers 18h30, ils terminent les balances. De nouveaux instruments trônent parmi les bidons : guitare, basse, batterie… Les Tambours du Bronx sont en mode WOMP : un projet Metal qu’ils portent depuis l’été 2018. Sorti le 19 octobre, l’album aux accents Indus prend toute son ampleur en Live : un son puissant couplé à une musique efficace. À aucun moment, la rage n’est contenue : au contraire, elle est portée par des textes engagés qui répondent comme un écho à l’énergie des bidons. En ces temps où la prise de risque se raréfie, l’approche est audacieuse ! Une véritable bouffée de créativité qui prouve que se réinventer a du bon. À moins de deux heures de l’ouverture des portes, certains musiciens peaufinent leurs réglages, d’autres se posent dans les loges… Pas mal d’allers et retours dans les couloirs : le batteur Franky Costanza – Dagoba, Blazing War Machine –, s’arrête pour saluer et discuter avec les gens de passage. Une partie des membres du groupe Flayed – qui assurent la première partie – font de même. La horde n’est pas encore lâchée mais elle est déjà dans l’ambiance du concert de ce soir. Quatre d’entre eux ont accepté de répondre à une dizaine de questions : Dom – qui passe à la guitare sur WOMP –, Will – aux Tambours – M’sieur Reuno au chant – Lofofora, Mudweiser, Madame Robert – et un invité surprise, Luc – aux Tambours –. Installés sur des flight-cases, l’interview commence en haut des escaliers du Liberté. Juste avant l’arrivée du public, l’instant semble assez irréaliste… et il l’est. Une parenthèse d’une trentaine de minutes avant l’effervescence.

1 – Comment se vit un partage de scène avec Sepultura ? Travailler avec eux a-t-il été l’élément déclencheur pour faire un album Metal ?
Dom : être sur scène avec eux, c’est une énorme claque. Sepultura, c’est violent mais Les Tambours aussi, alors les deux ensemble… Sur scène, on ressent vraiment toute cette grosse énergie. C’est quelque chose ! On a fait pas mal de dates avec eux, que des gros festivals.
Will : on a joué en Allemagne, au Portugal, au Brésil, à New-York…
Dom : ouais, et c’est vrai qu’en réfléchissant à un nouveau spectacle, on s’est dit pourquoi pas Metal ?

2 – Les Tambours, Reuno (Lofofora), Franky Costanza (Blazing War Machine, Dagoba), Stéphane Buriez (Loudblast)… Je ne les cite pas tous mais il y a du beau monde. Qui a eu l’idée de réunir tous ces excellents musiciens ?
Dom : Tout est parti d’une blague… Il y a quelques années, on avait dit à Franky « si tu t’emmerdes chez Dagoba, viens avec nous. » On s’est retrouvés plus tard et une fois qu’il a accepté le projet, on a contacté Reuno qui a proposé à Stéphane Buriez de nous rejoindre.
Reuno : je leur ai dit que j’étais pas dispo mais que je me débrouillerai pour l’être. J’avais envie de leur écrire des chansons, de bosser avec eux… Si j’avais refusé, je l’aurais regretté. Mais avec mes autres projets, je savais que je ne pourrai pas assurer toutes les dates, j’ai donc proposé un binôme avec Stéphane Buriez (Loudblast). Renato (Trepalium, Flayed) nous a rejoint aussi tout récemment au chant. Il sera d’ailleurs là ce soir.

3 – Les compos de l’album regorgent d’influences différentes. Un mélange qui sonne Metal, Punk, Rock et même Indus. Qui a posé les premiers jalons des compositions ? Comment s’est organisée cette phase de création ?
Dom : chez les Tambours, on écoute de tout. Niveau âge, le plus jeune a 25 ans et le plus vieux 60 ans. On représente tous des générations différentes et on se nourrit des influences de chacun. Pour ce projet, on est quelques Tambours à être passés à la guitare. On a commencé à composer de notre côté et les textes ont suivi avec Reuno et Stéphane.

4 – Voix, basse, guitare, batterie et pas mal de tambours… En studio, comment on obtient ce son limpide et puissant à la fois ?
Dom : on a tout bossé à la maison, dans notre propre studio. À force, on commence à avoir l’habitude d’enregistrer les bidons, on cherche à garder l’énergie même si on sait que ça ne sera jamais comme sur scène. Le mixage a aussi était très important, on a travaillé avec Hk Krauss (Vamacara Studio).
Reuno : avec Buriez, on a couché toutes les voix en deux jours. Tout s’est fait très simplement.

5 – Comment travaillez-vous avec Franky Costanza ? Face à une telle masse rythmique, est-ce à la batterie de s’adapter ?
Will et Dom : oui, clairement.
Dom : il s’est beaucoup remis en question. Il a su s’adapter, jouer avec les bidons en simplifiant son jeu. Il ne charge pas son jeu, n’en fait jamais trop… Il s’est parfaitement intégré aux Tambours.
Reuno : son jeu groove vraiment sur cet album.

6 – Reuno, comme dans Lofo, les textes percutes. Des mots engagés mais toujours emprunts de poésie. La société t’inspire mais as-tu des noms d’auteurs et/ou de musiciens qui t’ont aidé à façonner ton écriture ?
Reuno : je suis un peu old school… Le Professeur Chauron, Jean-Yann, Coluche… Claude Nougaro aussi. C’est un mec qui arrivait à faire des textes très percutants, le son des mots compte chez lui.

7 – Reuno, même dans tes reprises, l’interprétation est habitée. La force des textes est-elle le secret ?
Reuno : il faut le jouer à fond. Le studio, c’est comme le cinéma mais la scène, c’est comme le théâtre. Les gens doivent comprendre tout de suite l’interprétation.

8 – Au Motocultor, vous avez fait une prestation qui a scotché tout le monde. À aucun moment l’énergie n’était contenue. Derrière les fûts, Franky parle de « horde » et vu du public, c’est clair que la horde est bien là. Est-ce que vous abordez vos presta sur les plus petites scènes de la même façon ?
Dom : peu importe la scène. C’est la marque des Tambours ! On ne peut pas se freiner. L’identité des Tambours, c’est le côté horde. On ne fait qu’un avec le bidon.
Reuno : se freiner, ça serait comme courir au ralenti.
Luc : il faut penser puissance. Toujours.
Will : tu ne sais jamais comment va terminer le concert. On est épuisés mais on continu, on se soutient les uns, les autres.

9 – Vous êtes des musiciens libres. Garder son indépendance passe-t-il par une part de Do it yourself ?
Dom : oui et non. Il y a forcément un peu de DIY, c’est le secret de notre longévité et c’est vrai qu’on a pas mal gardé le contrôle même si on est entouré de professionnels. Mais je te dirai qu’aujourd’hui c’est de plus en plus compliqué d’être seuls.

10 – Se réinventer, un adage qui vous correspond ? Pouvez-vous nous parler de vos projets parallèles ?
Reuno : plus je vieillis, plus j’ai envie de créer. Le Rock est bien pour ça, c’est pas une musique confortable, ça nous pousse à aller vers de nouveaux challenges et artistiquement, ça me remplit. Le projet des Tambours me plaît mais j’ai aussi mon groupe de stoner Mudweiser (il montre son T-shirt). Je prépare aussi les textes du 11ème album de Lofofora. Et plus récemment, il y a Madame Robert.
Dom : on a toujours notre spectacle classique. On est en train de le revisiter : on revient avec un son plus percussion, toujours avec Franky mais avec un stand percu-électro cette fois. On a aussi un autre projet avec Will.
Will : je suis aussi batteur dans un groupe avec Dom mais là, on a pas le temps de bosser dessus. On espère y revenir dès qu’on pourra.
Dom : on travaille avec Apolline. C’est elle qui est au chant sur l’album pour la reprise de Prodigy.

11 – Un combat/un engagement qui vous semble prioritaire aujourd’hui ?
Reuno : l’environnement. Que les gens se responsabilisent et qu’ils arrêtent d’acheter de la merde. On a tous des enfants, il faut penser à la planète qu’on leur laissera. C’est la priorité.

12 – Deux noms de groupes et/ou de musiciens que vous écoutez toujours ?
Dom : oh, c’est compliqué comme question. Il y en a trop ! Là en ce moment, s’il faut t’en donner un, je dirai Prong mais j’écoute vraiment plein d’autres groupes. J’aime aussi beaucoup le Crossover mais on a une culture musicale très variée chez les Tambours, alors je pourrai te citer plein de styles et de références.

Denis Barthe

Rennes, vendredi 7 décembre 2018. De la pluie, du vent… et des passants qui courent pour s’abriter. Pas de chance… l’heure tourne et le mauvais temps redouble. Et puis, sans prévenir… l’éclaircie arrive. C’est le moment d’en profiter ! Le QG des Bars en Trans n’est pas loin… Situé sur une voie parallèle à la rue de Brest, l’endroit est discret : une façade grise, des gens qui discutent dans une arrière cour mais pas plus d’indication. C’est à l’intérieur, que tout se précise : avec une émission de radio en direct, un concert et des interviews, il règne ici une cacophonie organisée. Un rapide coup d’œil, un renseignement à la borne d’accueil… Ouf.. The Very Small Orchestra n’est pas encore là. Il n’y a plus qu’à attendre.
Vers 16h00, les musiciens font leur entrée et ils n’ont de small que le nom. Ils sont six et parmi eux, des visages connus : Vincent Bosler (The Hyènes…), Kiki Graciet (Niko EtxartCalvin Russell…) et bien sûr Denis Barthe (Noir Désir, The Hyènes, Mountain Men…). À peine arrivés, ils prennent place derrière les micros de C Lab et de Radio Campus Paris. Les questions des chroniqueurs défilent et d’emblée, le ton tranche avec le groupe précédent. Les musiciens sont plus francs, plus instinctifs… sans artifices. Leur musique, ils la définissent comme rock, presque cinématographique. Entre deux blagues, ils expliquent qu’ils sont allés là où on ne les attendait pas : « au départ, il n’y avait que Kiki et moi et puis, c’est devenu une grosse blague. On s’est dit, on invite des potes à faire un album et pourquoi pas faire un concert de temps en temps avec tous les gens qui ont participé et ça s’est développé comme ça », explique Vincent Bosler. « C’est la cour de récréation (…) oui, on se permet tout ce qu’on se serait pas permis dans nos groupes respectifs. (…) on est en mode Do it yourself et je ne devrai pas le dire mais jusqu’au troisième album, on avait pas une répète au compteur. On montait sur scène, on jouait et c’est ce qui plaisait à tout le monde », ajoute Denis Barthe. Et il est clair que quand on les voit sur scène, l’expérience est indéniable ! Avoir suffisamment de bouteille pour être capable d’improviser devant un public, c’est ce à quoi aspire tout bon musicien et ils le font. La liberté… et la musique comme acte politique, Denis Barthe est le premier à relever ces engagements : « on habite un pays où sur les mairies, il y a noté liberté, égalité, fraternité… ça commence par liberté et tous les jours, on t’en éteint une petite. » Des mots qui font sens et que le batteur clame depuis presque quarante ans. Avec Noir Désir, il s’exprimait déjà sans filtre : un franc-parler devenu presque militant dans la France d’aujourd’hui. Une façon d’être qui transparaît jusque dans son jeu de batterie… Précise, claire : sa frappe est sans concession et ses plans toujours justes. Une réelle identité rythmique qui colle parfaitement à The Very Small Orchestra et The Hyènes… et qui marquera à jamais les mémoires dans Noir Désir. Avec beaucoup d’honnêteté et de simplicité, il a accepté de répondre à quelques questions. Un moment volé entre deux interviews…

1 – La rencontre avec la batterie, un heureux hasard ?
J’ai rencontré mes potes dans une fiesta. J’ai discuté avec Serge en premier et il m’a montré un mec plus loin, c’était Bertrand, il m’a dit on va monter un groupe ça te brancherait ? J’ai répondu oui. C’est comme ça que le groupe a commencé. J’avais jamais touché à une batterie, je n’ai rien dit, j’avais envie au moins d’essayer. Je me suis entraîné comme un fou pendant quinze jours sur un kit acheté d’occasion et à la fin de notre première répète, Serge m’a dit « tu connais Highway to Hell » et là encore, j’ai répondu oui, on à terminé par ça je ne savais pas que c’était parti pour trente ans. Après, j’ai aussi la chance d’avoir un frangin qui aime la musique, ça m’a rendu curieux. Il jouait de l’orgue, avait aussi une belle collection de vinyles et ça a compté dans mon adolescence.

2 – Vous avez une frappe précise, percutante. Est-ce le fait d’avoir intégré tout de suite un groupe qui vous a permis d’acquérir une telle efficacité ?
Intégrer un groupe, ça aide. J’aime pas bosser seul. Je travaille si possible au moins avec un bassiste ou un guitariste. Quand je suis en solo, c’est pour travailler une technique précise ou un plan que j’ai en tête. Je peux aussi dire merci à deux producteurs : Ted Nicely et Ian Broudie qui m’ont beaucoup apporté. À la base, je suis un autodidacte et en bossant avec eux, ils m’ont poussé là où je ne serai peut être jamais allé. J’ai beaucoup appris, notamment à jouer avec le clic, à l’anticiper et contrôler ma frappe.

3 – Deux mots pour décrire un bon batteur ?
Quelqu’un qui sait avant tout écouter, qui a bien sûr du feeling mais aussi de l’instinct. Même avec une bonne technique, si tu ne transmets pas les bonnes sensations, ça ne donnera rien d’intéressant. 4 – Le matériel, c’est important pour vous ? Sur quoi jouez-vous ? Le matériel c’est du plaisir et il faut surtout trouver le kit qui te correspond. J’ai entre autre une Pearl, la même depuis 1996. Je suis surtout habitué à cette batterie, j’ai mon propre réglage et elle me convient parfaitement.

4 – Le matériel, c’est important pour vous ? Sur quoi jouez-vous ?
Le matériel c’est du plaisir et il faut surtout trouver le kit qui te correspond. J’ai entre autre une Pearl, la même depuis 1996.  Je suis surtout habitué à cette batterie, j’ai mon propre réglage et elle me convient parfaitement.

5 – Quel type de musicien vous inspire ?
Je suis attaché aux gens qui toute leur vie tracent le même sillon en essayant de le faire le mieux possible Des gens qui vont au bout des choses : les perfectionnistes.

6 – Si je vous dis Tostaky ?
Un grand souvenir. Un grand moment, et un grand virage aussi… On savait qu’il n’y aurait pas de Tostaky 2 on était allé au bout de quelque chose, ce qui allait suivre serait forcément différent.

7 – Dans vos concerts, vous aviez l’habitude de ne jamais faire la chanson Tostaky de la même façon.
On avait des approches différentes dans l’instant, c’est ce qui nous plaisait, la liberté de faire à toujours été vitale.

8 – Si je vous dis Les Têtes Raides ?
Ce sont des amis. Un très beau souvenir et une grande fierté d’avoir produit l’album Fragile. On les a connu en collaborant sur la chanson L’identité, nous avons tous bossé ensemble comme des vieux potes que nous n’étions pas encore et que nous sommes devenus.

9 – Quel souvenir gardez-vous de votre rencontre avec Alain Bashung ?
C’était quelqu’un d’infiniment gentil. Discuter avec Alain Bashung, c’était comme se balader dans un jardin luxuriant. C’était à la fois quelqu’un de très simple et un véritable artiste en recherche d’absolu, en un mot La classe.

10 – L’engagement faisait partie de l’identité de Noir Désir et vous n’étiez pas le dernier à vous exprimer. Aujourd’hui, qu’en est-il ? Quel est le combat qui vous semble prioritaire ?
Aujourd’hui, on devrait se battre avant tout pour la liberté, elle perd du terrain chaque jour. Le problème, c’est que le manque de solidarité gagne du terrain et l’individualisme ne mène à rien.

11 – Quand Albert Dupontel vous a contacté pour composer la B.O. de son film Enfermés Dehors. Avez-vous accepté tout de suite ? Comment s’est traduit l’exercice ?
Il m’a téléphoné pour me dire que le thème de son film était plutôt rock’n’roll et qu’il aimerait que nous bossions ensemble. A ce moment-là, il m’a vraiment redonné envie de jouer de la musique. On a travaillé en studio chez moi avec Jean-Paul Roy et Vincent Bosler directement à l’image, avec Albert. Il nous a dit ce qu’il voulait sur telle ou telle scène, on proposé des choses et le boulot s’est engagé. The Hyènes est né suite à la suite ça et le nom du groupe fait clairement référence à la scène culte de Bernie.

12 – Avez-vous envie de travailler avec d’autres réalisateurs ?
Oui, on a déjà travaillé sur un court-métrage qui s’appelle Desperadiou, on joue dedans, un hasard et des rencontres. On est ouvert à ce genre de propositions, c’est super intéressant.

13 – Le groupe The Hyènes, encore un heureux hasard ?
Oui en quelque sorte, une rencontre d’éléments incontrôlés et incontrôlables, on prépare un nouvel album, sortie et tournée en 2020

14 – Des groupes que vous écoutez en ce moment ?
Pogo Car Crash Control, Delgres, Gunwood et je réécoute aussi RL Burnside ces temps-ci.

15 – Un souhait pour les années à venir ?
Qu’on essaie tous d’être plus heureux, ça peut paraître con mais au fond qu’il y a t-il d’autre d’important ?

Henry Padovani

Rennes, jeudi 6 décembre 2018. Il est tôt mais les gens investissent déjà le Mondo Bizarro. Il faut dire que ce soir, Bruno a soigné sa prog. : il reçoit The Flying Padovanis, un groupe qui existe depuis 1981 et qui défend un son instru rock. C’est fluide, hors du temps… une musique avec une forte empreinte cinématographique qui pourrait s’inscrire sur la B.O. d’un film de Quentin Tarantino. Porté par une technique impeccable, Henry Padovani (The Police, Kim Wilde, Wayne County & the Electric Chairs…), Paul Slack (Uk Subs…) et Chris Musto (Kim Wilde, Nico, Joe Strummer, Glen Matlock, Johnny Thunders…) sont les dignes représentants d’un son qui ne vieillit pas. Ça sent le concert mémorable, non ? Oui, sauf que le batteur n’est pas présent. Sortant tout juste d’une opération, il est remplacé au pied levé par Thomas, un jeune musicien qui n’en revient toujours pas d’être là. Dans la loge, Henry Padovani discute à la cool. Guitare sur les genoux, il parle gratte avec les membres de Wolfoni qui assurent la première partie. L’ambiance est détendue. Pas de stress ici, la musique fait partie du quotidien. Pendant l’interview, Henry raconte tout : ses premiers années à Londres, sa rencontre avec Sting, son travail de producteur chez IRS Records… Beaucoup de franchise et de sagesse dans ses propos… et toujours les mots justes quand il cite ceux qui ont croisé sa route. Les musiciens, les amis… tout se mêle. Les gens avec qui il joue, il les connaît depuis presque quarante ans : une confiance totale qui fait toute la différence. Oui, le musicien excelle dans son art mais tout prend sens quand il donne la réplique à Paul, Chris… ou Sting. Aujourd’hui, moins de dix minutes avant d’entrer en scène, Henry déconne avec Paul, son complice de toujours. Profiter de l’instant présent, jouer devant un public qu’il ne connaît pas… Le live, il n’arrêtera jamais. Apprendre non plus. Se perfectionner encore et encore… Seuls les Grands ont cette volonté de peaufiner leur technique à l’infini. Affûter, faire mieux, aller au bout de sa passion… Un regard tourné vers l’avenir qui donne une bonne leçon d’humilité. Est-ce là le secret de son talent ?

Interview en solo

1 – Vous avez commencé la guitare à 14 ans, qui vous a inspiré ? Comment avez-vous commencé à jouer ?
J’étais en vacances chez ma grand-mère et je m’ennuyais. On était au lit à 21h tous les soirs. Je lisais un « Bonne soirée ». Tu connais ? Je fais non de la tête.
Dedans, il y avait un encart sur « Apprendre la musique sans peine ». J’ai essayé en jouant sur la guitare que m’avait offert mon oncle. Il avait dû me l’offrir à 9 ans mais je n’y avais jamais touché jusque là.

2 – Pourquoi être parti à Londres ? C’est la musique qui vous a attiré là-bas ?
J’ai rencontré un anglais qui m’a dit d’y aller, qu’il pouvait m’héberger. J’étais juste parti en vacances. Je devais y être pour 15 jours et j’y suis resté.

3 – Un souvenir marquant de cette époque ?
La première fois que je suis allé dans un club. À cette époque, j’avais les cheveux longs et une barbe : j’étais un hippie. Quand je suis entré, c’était le choc. Le lendemain, j’ai changé de look, j’ai tout rasé.

4 – The Police avait un côté plus rock, presque punk à ses débuts. Était-ce votre empreinte à
vous ou celle de Stewart Copeland ?
Stewart avait monté le groupe. À l’époque, il jouait dans un groupe progressif qui avait pas mal de succès et il savait exactement ce qu’il voulait. Avec The Police, il avait tout prévu et j’ai suivi. Il est allé chercher Sting qui voulait faire du jazz-rock mais à ce moment-là, il n’avait pas d’autres projets. Il nous a rejoint et ça a commencé comme ça.

5 – Vous avez été directeur et vice-président de IRS Records. Dans quels projets vous êtes-vous le plus investi ?
Henri : The Fleshtones, Concrete Blonde… Tout le monde a dit que j’avais signé REM mais c’est faux. Mais oui, IRS Records les a signé : on voulait vraiment que ça marche et c’est ce qui s’est passé.

6 – Que pensez-vous du paysage musical actuel ?
Aujourd’hui, j’écoute surtout des morceaux que j’ai envie d’étudier. En ce moment je travaille du JB Lenoir. Je n’ai jamais eu le temps de le faire et là, je le prends.

7 – Et en France ?
Je ne sais pas. Je ne connais plus. Avant, j’écoutais pas mal de groupes mais plus maintenant. J’ai quand même parfois de bonnes surprises : je suis tombé sur un groupe les Cinq Oreilles. Très bon !

8 – Un mot pour définir ce qu’est un bon musicien ?
Quelqu’un qui est bon à ce qu’il fait. John Lee Hooker, il ne fait qu’un seul accord mais qu’est-ce qu’il le fait bien ! Radiohead, par exemple. Ils sont très bons dans leur domaine mais je suis pas sûr qu’ils pourraient faire autre chose.

9 – Un événement marquant de votre carrière ?
Le prochain concert.

10 – Un mot sur le concert du 12 novembre 2016 au Bataclan, avec Sting ?
C’était un moment que je devais partager avec lui. Je crois qu’il voulait vraiment qu’on soit ensemble. Être là tous les deux. Dans le public, les gens avaient des portraits de ceux qu’ils ont perdu et Sting a su mettre une ambiance. Il a osé y aller, là où beaucoup ont refusé. La classe ! Oui, Sting a la classe !
Il s’arrête un moment et reprend.
Tu sais, avec mon fils, on devait aller au concert de The Eagles of Death Metal. Ce soir-là, j’ai préféré rester au chaud au coin du feu. Mon fils n’a pas bougé non plus.

11 – Quand on a vécu autant de vies, est-ce qu’on a encore des rêves à réaliser ?
Je fais beaucoup de concerts et j’ai encore envie d’en faire. Aujourd’hui, j’aspire à une vie tranquille avec ma compagne. Une vie simple.

Interview en duo

1 – Votre définition du rock ?
Henry : ce petit truc indéfinissable. Le style.
Paul : Henry.

2 – Depuis quand jouez-vous ensemble ?
Henry : 1981, 1982… Je crois que Paul a retrouvé une image d’archives…
Paul, le bassiste sort son portable et montre le visuel d’une vieille annonce. C’est celle à laquelle il a répondu quand il a intégré le groupe.
Paul : mars 1981.

3 – Le rock dans les années 80, c’était comment ?
Paul : c’était fou !

4 – Sans Cafés Concerts, pas de diversité musicale. Avez-vous un lieu de référence à nous faire partager ?
Henry : Chez Picolo (en Aveyron). Je pense à lui mais il y en a plein !

5 – Une rencontre qui a marqué l’histoire de votre groupe ?
Henry : Paul.

6 – Votre musique pourrait avoir sa place dans un film. Un film de Tarantino, par exemple. Vous êtes d’accord avec ça ?
Henry : complètement. Tu parles de Tarantino parce que tu es jeune mais avant, il y en avait beaucoup des groupes comme ça. Aujourd’hui, il n’y en a plus beaucoup. On est là pour faire vivre cette musique, montrer qu’elle existe. Et parfois, on est très étonnés… On est tombés sur un groupe – Les Infidèles – qui faisait des reprises de The Flying Padovanis.

Canal B : Metal Injection (septembre 2019)

Et oui, déjà quatorze ans que Metal Injection fait la part belle aux musiques extrêmes. Animé par Yannick, Olivier, Marion et Arthur, l’émission de CanalB balaie l’actualité du Metal tous les dimanches de 21h30 à 23h00. Au programme : de l’info mais aussi une sélection de morceaux soigneusement choisis par l’équipe. Il faut dire que les présentateurs en connaissent un rayon sur le sujet : du Heavy au Black ils parlent avec la même ferveur de groupes internationaux que de formations locales. Mais comment expliquer cette longévité ? Les années passent et deux des présentateurs d’origines sont toujours là. Entre le quotidien et les journées de boulot, ils se retrouvent chaque semaine dans les studios de CanalB… ou ailleurs. Ailleurs ? Oui, Arthur travaille à l’étranger depuis 2015 mais participe toujours à l’émission. À l’heure d’Internet, ils n’ont pas hésité à tenter le coup ! S’adapter, rester soudés malgré les aléas de la vie et la musique au centre de tout… Est-ce la bonne formule pour garder sa passion intacte ? Pour le savoir, le mieux est de pousser les portes du studio. Marion et Yannick ont justement accepté de répondre à quelques questions pendant leur émission. Des instants volés en direct, entre deux prises d’antenne.

1 – Est-ce le Metal qui vous a amené à faire de la radio ?
Yannick : oui, on a commencé en 2005 avec Olivier. Sur Canal B, avant nous, il y avait l’émission Metalik Park. Olivier m’a proposé de voir s’il était possible de reprendre leur créneau. Il a contacté la station et Yvan Penvern nous a laissé notre chance. Après une formation technique express dispensée par Yann Barbotin, nous avons fait deux essais d’émission « off », puis il nous a dit « c’est bon ». Ça fait bizarre, ça fait déjà 14 ans.
Marion : le Metal et l’amitié aussi. En 2015 les gars m’avaient proposé de faire un test pour lequel j’avais freiné des quatre fers. Je n’avais jamais fait de studio avant ça. Et j’y suis toujours…

2 – Qui est là depuis le plus longtemps ?
Yannick : Olivier et moi. Tu peux mettre Olivier en avant parce que c’est lui qui est à l’origine du projet.

3 – Un mot pour décrire Metal Injection ?
Marion : apéro.
Yannick : plaisir.

4 – Comment préparez-vous vos émissions ? Qui fait quoi ?
Yannick : Arthur, Olivier et moi, on a une playlist qu’on remplit chacun notre tour. Une fois que c’est fait, je récupère les fichiers. On démarche aussi les labels pour enrichir la programmation. On fait tout à distance, sur Internet. Au début, on se retrouvait le jeudi soir mais on a arrêté, c’était la zone.
Marion : Lorsqu’on reçoit des groupes pour les spéciales, c’est pour moi. La partie interview, c’est ce que je préfère.

5 – On met forcément de soi quand on fait de la radio ?
Yannick : oui, déjà parce que ça prend du temps. Il faut de la rigueur, de la discipline. Quand on prépare l’émission, tout est plus ou moins calé mais il faut toujours prévoir une marge. On s’adapte. Parfois, on passe la moitié des morceaux et c’est pas grave. On se laisse porter par ce qui se passe ici, surtout lorsque nous recevons des invités.
Marion : oui, forcément. On est là parce qu’ on a envie de partager. On se bouge sur les concerts, on cherche à faire découvrir de nouveaux morceaux, de nouveaux groupes, on y consacre du temps. Avec le boulot, c’est pas toujours simple mais nous sommes contents de nous retrouver pour faire ça ensemble.
Yannick : et pour tout vous dire, dans le Classique de la Semaine, je mets toujours un morceau que j’aime, issu de ma discographie personnelle. Je le fais depuis le début.

6 – Aujourd’hui, impossible de faire de la radio sans réseaux sociaux ?
Marion : c’est difficile de faire sans, c’est vraiment un média complémentaire.
Yannick : ça aide à faire connaître l’émission. C’est aussi comme ça que les groupes nous contactent et que les labels repèrent ce qu’on passe. C’est pratique. Avant, on faisait tout par mail et c’était plus long.

7 – Est-ce que vous écoutez d’autres émissions radio ? Avez-vous des contacts avec l’équipe de Rennes to the Hills ?
Yannick : je suis un vilain petit canard, je n’écoute jamais la radio. Quand j’étais plus jeune j’écoutais Radio Méduse, Punch FM et même Radio Abeille, des radios locales du pays de Lorient. Sur Radio Méduse, il y avait une émission Metal : Metal Invasion.
Marion : pas beaucoup. Parfois RTL2, Hotmix radio Metal.

8 – En vingt ans, la scène Metal a beaucoup évolué en France. Que pensez-vous du Hellfest d’aujourd’hui ?
Marion : ça fait plusieurs années que j’y vais. J’ai fait une pause en 2018 parce que j’avais l’impression de voir toujours la même prog. J’y retourne car ça reste un beau festival et l’occasion de passer un bon moment avec les potes.
Yannick : j’ai fait quasi toutes les éditions de 2006 à 2012. J’aimais beaucoup, autant pour la prog, que le prix et le public. Et puis, quand ils ont changé de site, c’est devenu cher et c’était impossible d’acheter un billet sans s’y prendre très à l’avance. C’est devenu une kermesse et ça ne s’adresse plus à des passionnés. Il y a des gens qui y vont et qui ne connaissent même pas les groupes qu’ils vont voir. Ils y vont parce que c’est bien d’y aller et de pouvoir dire « j’y étais ». Ce n’est pas ma conception des choses.

9 – Et le Motocultor ?
Yannick : j’y suis allé une fois en 2015 et c’était vraiment très bien. Le festival est à échelle plus humaine que le Hellfest. T’es pas obligé de te garer super loin et de marcher 30 ou 40 minutes pour te rendre au pied d’une scène.
Marion : j’y étais avec Yannick. On y retourne cette année. Là-bas tu n’es pas dans le stress et tu te sens chez toi…

10 – Un ou des label(s) que vous soutenez ?
Yannick : Pas particulièrement. Cependant, Legion of Death, c’était vraiment de l’underground. Il y a aussi Impious Desecration Records, c’est rennais. En gros label, il y a Osmose, ils signent des groupes de qualité en Death et en Black Metal.

11 – Et des groupes ?
Yannick : il y a Season of Tears, Darwin, Sideburn, HexecutorEt aussi, Retentum Curiae, le groupe n’existe plus. Leur dernier concert était le 666 (6 juin 2006) au Mondo Bizarro. J’ai encore le T-shirt. Par définition nous sommes là pour aider à la promotion de tous les groupes qui veulent bien nous rendre visite.
Marion : il y a aussi Mantra.
Yannick : oui, Mantra. Ils sont d’ailleurs venus il n’y a pas longtemps.

12 – Pas de Metal Injection sans scène locale, vous êtes d’accord avec ça ?
Marion : l’objectif est de valoriser la scène locale, alors oui. C’est aussi la politique de CanalB.
Yannick : on annonce les concerts des groupes du coin toutes les semaines.

14 – Trois groupes que vous écoutez ?
Marion : Hypocrisy, c’est le premier groupe que j’ai vu sur scène. C’est celui qui a tout fait. C’était à l’Antipode, j’avais 15 ans. Je mettrai aussi Rammstein. Et pour finir Solstafir, ça me détend, j’aime leurs imperfections et leur côté barré.
Yannick : Mötley Crüe, c’est obligé. La première fois que je les ai vu dans un magazine, je me suis dit : « C’est ça que je veux faire plus tard ». Alice Cooper aussi. Quand je l’ai découvert, j’étais en C.M.1. C’est mon frère qui l’écoutait. Et forcément le premier album des Guns N’Roses. Et il y aussi Motörhead, je ne peux pas oublier Lemmy.

15 – Qui rêvez-vous d’interviewer ?
Yannick : il est mort, c’est Lemmy. Nikki Sixx aussi, il a un discours qui me plaît bien. Il a été déclaré mort cliniquement et il est revenu… Il a eu une vie qui ne ressemble à personne.
Marion : Cory Taylor, le chanteur de Slipknot. Ou bien Mike Patton, le chanteur de Faith No More pour son travail très abouti artistiquement.
Yannick : il y a aussi Alice Cooper !
Marion : ah oui, Alice Cooper !

Caroline Vannier
Benjamin Vannier

Sur le Web :
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Flav, musicien… et programmateur au Bar’Hic (juillet 2019)

Le Bar’Hic va fermer… Triste nouvelle mais c’est bel et bien ce qu’on entend depuis quelques semaines. Situé tout en haut de la place des Lices, le bar est un lieu bien connu des amateurs de Rock, Metal, Punk, Blues et Électro à Rennes. Alors forcément, une telle annonce inquiète pas mal de monde. Mais qu’en est-il vraiment ? Simple changement de nom ou arrêt définitif des concerts ? Exit les rumeurs ! Le mieux est de se rendre sur place et de rencontrer celui qui gère la prog du caf’con’.

« Oui », confie-t-il. « Tout va changer ici. Il y aura toujours des concerts, une partie de l’équipe reste mais le nom, la déco et la dynamique ne seront plus les mêmes. Il y aura un autre programmateur à partir de septembre. » Flavien s’en va mais son travail ne sera pas passé inaperçu. Bien au contraire. En moins d’un an, l’ex barman s’est fait un nom. Groupes, tourneurs, asso… son carnet d’adresses est bien rempli et c’est mérité : « Marion était là avant moi. C’est elle qui a commencé à mettre tout ça en place. » Quoi qu’il en dise le public et les musiciens apprécient la qualité de sa prog et la sincérité de sa démarche. Son atout ? Mettre en avant des formations en qui il croit : « Darcy, Rataxes, 22 Longs Riffs… Après, il y en a eu plein des groupes que je voulais faire jouer ici et qui sont venus. Gros coup de cœur quand même pour Em Shepherd, un groupe nantais de rock électro jazzy. C’est monstrueux ce qu’ils font : un son d’une propreté hallucinante. » Flav est là depuis seulement dix mois mais il sait de quoi il parle. Pas étonnant, avec les deux pieds dans la musique depuis l’adolescence, il est loin d’être un novice : « j’ai commencé la batterie à quatorze ans mais le virus m’a pris entre huit et dix ans. Mes grands-parents avaient MTV et un jour, j’ai vu un tout jeune batteur faire un show. Je me suis tout de suite dit que c’était ça que je voulais faire. Au collège, j’avais déjà un pote qui jouait de la zik et j’ai suivi. Mes parents m’ont toujours soutenu et ils le font encore aujourd’hui, j’ai beaucoup de chance. » Depuis ses quatorze ans, il ne lâchera rien. Après le bac, il passe une licence en Musicologie et intègre l’école Agostini à Nantes : « la licence m’a ouvert à d’autres horizons. J’ai appris à écouter la musique. » Très vite, il joue en groupes mais c’est à la Fac qu’il fera des rencontres décisives : « Avec Gus – chanteur/guitariste chez Sîn –, on était dans la même promo. On a créé un premier projet qui n’a pas tenu mais on en a remonté un autre en 2016 : Sîn. » Les trois musiciens enchaînent les concerts et signent quelques belles dates comme à l’UBU ou au Ferrailleur. Entre Metal, Stoner et Rock, leur son se fait une place dans le milieu de l’underground. Ils préparent actuellement un album qui devrait sortir pour la fin de l’année 2019.

Quand Flav parle de musique, il y a beaucoup de passion dans ses propos mais le boulot n’est jamais loin. Développer sa propre approche de l’instrument passe forcément par une excellente maîtrise technique. Devenir un bon musicien prend du temps et il n’est pas avare de compliments quand il cite ceux capables de l’être : « Alex Jadi, un batteur avec un énorme cursus. Il est terrible sur scène. Il joue dans Fange et Swaarm. Il est au-dessus de tout le monde et c’est une crème. »

Flav’ poursuit sa carrière de batteur dans Sîn et il n’abandonne pas la prog. À la rentrée, il intègre l’équipe du Dejaze. Une nouvelle aventure commence pour lui… et pour pas mal de groupes qui espèrent le suivre. Il l’assure, l’éclectisme de sa programmation, il tient à la garder. « Je veux, par exemple, continuer à travailler avec des asso de Hardcore. C’est une scène très active à Rennes. » Il s’arrête un moment puis poursuit : « je les cite eux mais il y a plein d’autres, des groupes ou des asso, dans des genres très différents à Rennes et ailleurs. L’erreur serait de se fermer. C’est toujours mieux d’accorder des dynamiques que des styles.» Diversifier, refuser l’homogénéité… Serait-ce la clé d’une soirée réussie ? Une idée à méditer.

Caroline Vannier

Sur le Web :
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