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Des histoires qui se vivent

Catégorie dans Les acteurs de la scène locale

Éric et Agnès, deux visages bien connus de la scène locale (septembre 2018)

Sans passionnés, pas de scène locale. Une constat simple qui prend sens quand on voit tout le boulot qui se cache derrière une organisation de concert. À Rennes, une poignée de personnes se bouge pour donner un coup de projecteur sur les groupes du coin. Des amoureux de la musique qui travaillent dans l’ombre pour offrir un peu de rêve le temps d’une soirée. Leur motivation ? Faire en sorte que les gens fassent des découvertes tout près de chez eux. Leur credo ? La musique se vit en live ! Et c’est pas Éric et Agnès qui diront le contraire. Ces deux-là font partie de ces irréductibles qui lâchent canapé et télé pour le Mondo Bizarro ou Le Marquis de Sade. Comme spectateurs ou membres de l’asso Ankou Prod, ils répondent présents quand l’affiche sonne rock ou metal. Et même s’ils bossent la journée, ils s’envolent le soir venu pour vivre l’instant présent. Oui, la musique est une constance chez eux mais ce n’est pas tout… Si on se penche sur leur quotidien, on se rend compte qu’ils n’arrêtent pas : nuit dans un château hanté, Zombie-Run, bénévole au Motocultor (pour Éric)… Oui, ils bouffent la vie à pleines dents. Une curiosité insatiable qui les enrichit d’une sacrée culture, d’un vrai point de vu et d’un carnet d’adresses bien rempli. Mais soyons clair : pas de calcul dans leur démarche, juste une envie d’assouvir et de partager leur passion. Un couple attachant bien implanté dans la scène locale et qui porte un discours généreux sur ce milieu. Bref, il était temps de mettre ces deux personnages en lumière. Mademoiselle Agnès, Monsieur Éric… À vous la parole !

1 – Premier coup de cœur musical ?
Agnès : Gainsbourg.
Éric : en 1991, en concert. Metallica et ACDC.

2 – Dernier coup de cœur musical ?
Agnès : Jackhammer et Klone.
Éric : Jackammer.

3 – Le groupe que vous avez le plus vu en concert ?
Agnès et Éric : Jackhammer.

4 – Ceux que vous écoutez le plus ?
Agnès : on écoute pas. On vit tout en live.
Éric : on fait entre 50 et 70 concerts par an. 1 à 2 par semaine.

5 – La musique a-t-elle toujours été présente dans votre vie ?
Éric : moi, non. J’ai été marié 20 ans et ma passion a été mise en sourdine pendant un moment.
Agnès (qui penche la tête vers Éric) : c’est lui qui m’a fait découvrir tout ça.
Éric (qui pose les yeux sur Agnès) : c’est ensemble qu’on a découvert ce milieu.

6 – Les endroits les plus sympa pour voir un concert ?
Éric : le Mondo Bizarro et Le Marquis de Sade pour le lieu et l’accueil. Le Bar’Hic plus pour le lieu. Le Jardin Moderne mais ça va au-delà des concerts : l’environnement est cool, c’est le lieu associatif par excellence.

7 – Qui de vous deux est le plus rock ?
Éric : Agnès !

8 – Qui de vous deux est le plus metal ?
Agnès : Éric !

9 – Le premier qui a sauté le pas pour l’organisation de concert ?
Éric : c’est moi. Jérémy – d’Ankou Prod – cherchait des forces vives. Je me suis proposé pour être secrétaire.

10 – Et toi Agnès, quel rôle as-tu dans l’asso Ankou Prod ?
Agnès : j’ai pas encore signé mais je suis trésorière de l’asso.

11 – Comment se porte la scène locale à Rennes ?
Éric : beaucoup de groupes, des lieux diversifiés… mais le public ne répond pas toujours présent. Les gens sont exigeants : ils ne se déplacent pas forcément pour un petit groupe. C’est dommage, on est presque obligé de programmer un gros groupe à chaque fois pour faire venir du monde.

12 – La scène locale en trois mots ?
Éric : variée, jeune et pro.
Agnès : pareil.

13 – Quel groupe aimeriez-vous faire jouer ? Tout est permis, même les rêves les plus fous.
Agnès : Mademoiselle K, Klone. Et je suis très contente de faire jouer El Royce.
Éric : Kvergan’s, Disconected… et ce sont des rêves qui vont peut-être se concrétiser.

14 – La photo et la vidéo, est-ce c’est quelque chose que tu souhaites développer Éric ?
Éric : la vidéo, j’aimerais bien. Sur 1 set, je filme 3 ou 4 morceaux. Quand on fait jouer des groupes, c’est important d’en parler. La vidéo est un bon moyen pour le faire.
Agnès : le pire, c’est qu’il fait ça avec son portable.
Éric : quand je filme, c’est le ressenti qui compte. Et avec un portable, c’est plus facile.

15 – Éric, si Agnès était une musique, quelle serait-elle ?
Éric : un concert acoustique. Pour l’anecdote, les Age of Who sont venus à la maison et ils nous ont offert un concert acoustique à la maison, avec les instruments qu’on a habituellement en déco. Un super souvenir !

16 – Agnès, même question. Quelle musique serait Éric ?
Agnès : un concert de metal.

17 – Le prochain concert, c’est quoi ?
Éric : le Motocultor, en tant que bénévole. Une première pour moi, j’y serai les 3 jours.
Agnès : moi, je le rejoins le dimanche mais pas comme bénévole.

18 – Un souhait pour les années à venir ?
Éric : porteur de la scène locale.
Agnès : ouvrir un café-concert.

 

Caroline Vannier

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Thomas, une des voix de l’underground (décembre 2018)

La musique, Thomas est tombé dedans quand il était petit… enfin, presque : « à 17 ans, j’étais fasciné par les labels, je voulais en monter un avec des potes mais je n’avais pas encore la dimension de ce que c’était dans son ensemble.» Une poignée d’années plus tard, le musicien organise des concerts, fait de la radio, écrit, monte un groupe, en intègre un autre, se met à la guitare, à la basse, au chant… Et ce n’est qu’un début ! Avec l’orga du festival Les Lunatiques – le 22 septembre 2018 –, il tape très fort. Mais là, on grille les étapes : on revient dix ans en arrière ?

Comme beaucoup d’histoires, tout est arrivé un peu par hasard : « mon père faisait de la basse. J’avais pas envie d’en faire mais il m’a dit, prends le temps d’y réfléchir, tous tes copains jouent d’un instrument différent, ça serait marrant que tu t’y mettes. » Un premier essai probant et Azoah se crée dans la foulée : un trio fusion/metal/rock qui privilégie la scène au studio. À cette époque, Thomas expérimente, il n’hésite d’ailleurs pas à troquer la basse contre le micro et la guitare. Là encore, l’essai est réussi et il faudra attendre cinq ans avant qu’il revienne à son instrument de prédilection. C’est Simon de Mantra qui vient le chercher : « mon groupe s’arrêtait et il a pris contact avec moi. La guitare et le chant, j’en avais fait le tour et il savait que ça collerait. » Et pour sûr ! Ces quatre-là se sont bien trouvés, Thomas propose un jeu subtil et solide : une approche empreinte de détails qui s’accorde parfaitement à la griffe Mantra.

« À Laval, j’ai vu Regarde Les Hommes Tomber à leurs débuts, on devait être trente dans le public et maintenant, ils remplissent les salles. » Comprendre la musique, ça passe aussi par l’écoute de celle des autres. Pendant ses études, Thomas devient chroniqueur pour des webzines et des radios. Une implication dans des médias qui « donnent de la voix à tous ceux qui sont dans l’ombre » : « oui, je me suis toujours intéressé à l’underground », précise-t-il. « Quand je n’organisais pas de concerts, il fallait que j’en parle sur papier. J’ai pigé dans trois webzines (Tours, Angers et Rennes). À la radio, je parlais surtout de jeux vidéos mais je faisais toujours un parallèle avec la musique. » Forcément, l’orga de concert, il y vient très vite. D’abord par passion mais aussi par nécessité : « Avec Azoah, on ne savait pas comment intégrer un réseau, faire des concerts… On nous avait dit qu’il fallait au moins une asso pour se crédibiliser mais je ne voulais pas faire ça tout seul dans mon coin. » Du Do it Yourself qui prend tout son sens avec Monte Ida, Sideburn, Gus Vendetta et son propre groupe Azoah : l’asso La Voix des Hères devient un collectif. Exit l’idée du label, ils font jouer des formations pointues comme As We Draw (les frères Sauvé) et Burning Bright : « moi, je m’occupais surtout des relations presse. » Des débutants… mais avec une organisation déjà rodée. Ils connaissaient leurs limites et ils ont attendu quatre ans avant de caler un projet de grosse envergure : « Nico de Black Karma est venu nous voir pour monter un festival. » Un appel bien reçu et… qui donne le coup d’envoi des Lunatiques en 2018 ! Les Lunatiques… Un nom évocateur qui refuse les étiquettes : « la prog ne sera pas toujours forcément metal », explique Thomas. Une bonne dose de réflexion, une belle affiche (Mars Red Sky, The Dali Thundering Concept, Ayahuasca…), un graphisme qui se démarque, une com’ maîtrisée… pas de doute, l’approche est très pro ! Thomas et sa bande peuvent être fiers, ils ont fait bouger 300 personnes ce soir-là. Une belle réussite qui lance illico la deuxième édition le 21 septembre 2019 !

Depuis presque dix ans, Thomas ne lâche rien. Un passionné qui sait s’effacer derrière ses propos pour mettre en valeur les groupes qu’il défend. La scène underground fait émerger bons nombre d’acteurs qui sont force de proposition. Thomas est de ceux-là, il partage une idée de la musique qui fait sens et qui promet encore de belles réussites dans les années à venir : « je voudrai bien écrire sur la musique. Je prends plein de notes de ce que je vois, des souvenirs de groupes… On verra. » Pour l’heure, les rendez-vous sont pris : on guette l’affiche des Lunatiques et on suit Mantra au Hellfest ? Le groupe s’y produira le jeudi 20 juin 2019. Respect messieurs !

 

Caroline Vannier

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Le Ty Anna Tavarn : un Café CULTURE emblématique à Rennes (novembre 2018)

Mardi, 20h00… du froid, de la pluie, pas de concert mais les gens sont là pour l’apéro. Ce soir, la terrasse du Ty Anna est occupée par des habitués mais pas que… Si on tend l’oreille, quelques clients viennent ici pour la première fois et ils ne sont pas déçus. Il faut dire qu’en arrivant devant le bar, la façade claque : murs à colombages, poutres apparentes, fenêtres anciennes… Une architecture quasi-médiévale qui participe à l’identité du lieu. C’est vrai, après tout… Le Ty Anna, c’est un peu comme les tavernes de l’époque : tous les publics s’y retrouvent et ça ne gêne personne, bien au contraire ! Ouais… sauf que dans les tavernes, il y avait des bagarres et que là, il n’y en a pas. C’est peut-être la musique qui aide… Ne dit-on pas qu’elle adoucit les mœurs ?

« Si je suis venu à Rennes, c’est pour faire un café concert », explique Gweno. Chez lui, la musique est à l’honneur presque tous les jours : « des groupes du coin et d’ailleurs, des asso mais aussi de gros événements comme Yaouank, les Bars en Trans, Jazz à l’Ouest, le Grand Soufflet, la Festive… » Tout au long de l’année, les concerts s’enchaînent sans jamais se ressembler. Du live dix mois sur douze ! Mais avec un tel rythme, comment allier qualité et diversité ? Pour le savoir, il n’y a qu’à suivre le taulier… Si vous passez place Sainte Anne, vous verrez sans doute la grande silhouette de Gweno arpenter la Rue de la Soif. En plus du Ty Anna, il gère le Bar’Hic et le Petit Bar mais quand on le lui dit, il secoue la tête et répond : « Je suis pas tout seul. Pour la prog du Bar’Hic, il y a Flavien, n’hésite pas aller le voir. Ce soir, moi, je vais uniquement te parler du Ty Anna

En 12 ans, il y en a eu des groupes à fouler la scène du 19 place Sainte Anne : « Au début, c’était surtout du jazz, du trad. et du rock. Et au fur et à mesure, on a ouvert au punk et au metal. Rien qu’au Ty Anna, on a 200 concerts par an. Il y a beaucoup de rendez-vous, des sessions de musique trad., jazz, funk, manouche, brésilienne, swing… On travaille aussi avec des groupes qui nous accompagnent depuis les débuts, comme Soultime qui sont là depuis septembre 2006.» Oui, mais comment gérer un tel planning ? Avec quatre à cinq concerts par semaine, il y a de quoi se perdre, non ?À l’ancienne, Gweno note sa prog sur des agendas papier qu’il conserve années après années mais il n’en a pas besoin, il retient tout. Il énumère des musiciens de la scène locale, des groupes et des asso qui l’ont marqué… Des dates et des noms qu’il cite sans jamais faire d’erreur. Des souvenirs, il en a un paquet mais il en retient surtout un : « Première date de Half Moon Run (Rock/Canada), c’était au Ty Anna. Un an et demi après, ils jouaient aux Vieilles Charrues. J’y étais comme spectateur et je l’ai découvert sur place. »

Mener des projets ensemble, faire avancer les choses… Des actions qui passent par les Cafés Concerts. Gweno me tend un fascicule du collectif Bar-bars : « Ça c’est très important ! C’est une asso de Cafés-Culture qui existe depuis 1999. On l’a lancé ici il y a maintenant 8 ans : on compte aujourd’hui 25 adhérents à Rennes et 500 dans toute la France. Avec les différents Caf’Con’, on provoque des rendez-vous. Les groupes qui veulent jouer peuvent directement entrer en contact avec nous.» Un circuit court qui se recentre autour de l’humain et de l’artistique mais rien ne se fait sans la ville, ni les habitants. Comment gérer autant d’interlocuteurs ? : « ça se passe bien, affirme Gweno. On communique beaucoup avec les élus. On a par exemple mis en place la Charte de la Vie Nocturne, un conseil de conciliation entre les riverains et les bars. » Au Ty Anna Tavarn, jamais de temps mort : un concert en appelle toujours un autre. En faisant un geste brusque, je fais tomber quelques flyers. Je les ramasse et remarque que c’est la prog de Yaouank 2018 : « oui, on est en plein dedans. Les premiers concerts commencent cette semaine. Et en décembre, on sera dans les Bars en Trans. La fin de l’année est chargée mais c’est bien », confirme-t-il.

En créant un Caf’Conc’, Gweno a fait beaucoup pour la musique live dans le centre de Rennes. Avec un brin d’audace, de passion et de clairvoyance, il a su donner une âme a un lieu qu’on ne présente plus. Le Ty Anna Tavarn offre une diversité culturelle qui fait du bien ! Un zone de liberté pour les groupes de tout horizon. Que demander de plus ? Ouais, on a de la chance à Rennes… Pourvu que ça dure !

 

Caroline Vannier

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Le Marquis de sade : un Caf’ Conc’ bien ancré à Rennes (juin 2018)

Depuis quelques années, Le Marquis de Sade s’est fait une belle place dans le paysage musical local. Rock, punk, metal, blues, electro… Ici, pas de guerre du son : tout le monde se côtoie. Il faut dire qu’à part la déco et le nom du bar – emprunté au groupe rennais Marquis de Sade – aucune préférence n’est affichée : « on aime le rock sous toutes ses formes » clament Alain et Seb. Mais comment créer une dynamique ? Aujourd’hui, qui a le cran de monter sa propre affaire ?

Pour le comprendre, il faut revenir sept ans en arrière. À ce moment-là, Le Marquis de Sade n’existe qu’à l’état de projet mais les discussions s’animent déjà dans un bar situé rue Saint-Sauveur. Alain est derrière le comptoir, Seb devant : le client et le barman partagent des points de vues similaires et à force d’échanges, l’aventure Marquis de Sade se concrétise. Pas de coup de tête, l’entreprise est réfléchie : pour Alain, c’est déjà la troisième affaire qui se monte. Fort d’une double expérience en tant que patron de bar, il sait où il va : un bagage non négligeable qui met le Marquis sur les rails. L’idée d’implanter un Caf’ Conc’ un peu à l’écart du centre ville est une évidence mais reste à trouver le bon emplacement. Une rue passante, des écoles et le parc du Thabor à quelques mètres de là… À priori, le lieu n’est pas idéal, pourtant Alain et Seb en saisissent tout le potentiel. Il faut une sacrée dose d’imagination pour voir ce que deviendra le 39 rue de Paris : « ici, c’était fermé depuis un an et demi. Il y avait du boulot. » explique Seb. Pas mal de travaux et un endroit exigu qui ne prédestine en rien la création d’une scène mais comme le répète Alain : « mieux vaut un petit chez soi qu’un grand chez les autres ».

Le Marquis de Sade ouvre en 2013. C’est plutôt récent quand on y pense… Pour les musiciens, il s’est inscrit si vite comme lieu de référence qu’on a l’impression qu’il est là depuis des années. Avec de la patience, de la passion et pas mal de bouche à oreille, le Caf’ Conc’ se fait un nom. La qualité du service et l’excellent accueil y sont pour beaucoup : « on est là pour servir des bières et accueillir les musiciens ». Des paroles humbles mais personne n’est dupe, le travail des deux tauliers y est pour beaucoup dans le succès du troquet. Un boulot rôdé et une organisation sans faille : « Seb est là pour assurer le quotidien. Moi, j’ai un autre travail mais je suis là pour assurer les arrières. » explique Alain.

Les vendredis et samedis soirs, les acteurs locaux investissent la petite scène du Marquis de Sade : « on donne la priorité aux asso qui sont là depuis le début comme FTTT, l’Alambik, Ankou Prod, Kfuel… Ah, j’espère qu’on en oublie pas. » Et les groupes ? Un moment d’hésitation, les deux associés se regardent puis répondent : «  ce qu’on pense n’est pas important. Il y a de bons musiciens et les groupes qui passent ici sont sérieux, la scène locale est bien vivante à Rennes ». Oui, et eux qu’est-ce qu’ils écoutent ? Est-ce qu’on peut en savoir plus sur ce qu’ils aiment ? Là encore, un petit silence s’installe et puis Seb commence à charrier son collègue : « bah, tu peux lui dire quand même ! » Alain sourit, pose son verre sur le comptoir et finit par avouer : « je suis allé voir Simple Minds 39 fois en concert. Je les suis depuis que je suis ado.» Oui, de vrais passionnés et ça ne s’arrête pas là : « Ah le concert des Marquis de Sade au liberté. On a fermé le bar pour aller les voir. C’était bien ! Au niveau musiciens, il y a encore des réglages à faire mais le chanteur a gardé sa prestance et sa voix. »

Le Marquis de Sade a encore de belles années devant lui : « on veut pérenniser le lieu et surtout ne jamais s’endormir sur nos lauriers ». Alain jette un œil derrière lui : « cet été, on va faire des travaux dans la salle de concert. » Seb ajoute : « on va passer de trois groupes à deux pour les soirées concert, ça sera plus confortable pour tout le monde. On voudrait aussi sensibiliser les musiciens au respect des normes acoustiques. » Au Marquis, les concerts se jouent de septembre à mi-mai mais hors saison, n’hésitez pas à passer pour l’apéro. L’accueil y est bon tout au long de l’année !

 

Caroline Vannier

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« Bistrots, Rades et Comptoirs » (février 2017)

Faire un Road Trip, qui n’a jamais fait, ne peut savoir ! Un plaisir innocent et vivifiant !  Se lever tous les jours dans un endroit frais, neuf, qui on ne sait pourquoi, se casera dans une mémoire à l’habitude si défaillante…  Confortable sensation pour un nomade à l’occidental, certes, il est plus facile de partir quand on sait que son chez-soi a un toit… migration du riche, migration du pauvre, l’un fonce vers le Sud pour découvrir quand l’autre monte vers le Nord pour survivre… Je m’égare : le propos,  c’est l’âme du bistrot et pas n’importe lequel … celui de notre péninsule !!! Un bouquin « Bistrots, Rades et Comptoirs » tombé sous le sapin. Le sujet ? Deux gars de la Vilaine (Sylvain Bertrand et Yann Lestréhan) qui décident un projet, né dans des comptoirs rennais : faire le tour des bars, pas « hype », mais atypiques ou plutôt, les plus attachants de notre contrée. Un mois de pinte, de ballon de rouge, de shooter : ça c’est pour le côté sportif de la chose. L’autre qui va de soit, c’est ce qu’on découvre à travers ce récit accompagné de photos, une aventure humaine, des rencontres, une visite dans le quotidien d’une société de partages qui n’a pas besoin de se réinventer puisqu’elle n’a jamais cessé d’exister.

Le livre relate ces jours remplis d’ivresse émotionnelle Chez Jeanine, de « vibration patriotique » (bretonne bien sûr) au Saint Jakez, l’abri du Vent ou au Ty Elise, des blagues à l’Halte là, de l’altruisme de Lambert, de l’ouverture d’esprit du Refuge ou de chez Karim au FaouëtChez Minouche, on comprend l’intérêt de lever la tête sans regarder le plafond et au Cap Sizun, on prendra un vin chaud à la Buvette … Ces brèves de comptoirs se succèdent dans une cacophonie réjouissante à travers des portraits, des visages de pays au-delà des clichés, des tranches de vie et des moments qui font du quotidien une jouissance de la vie ! Le début de la lecture débute par un sentiment de curiosité, puis progressivement on se forge la conviction qu’il est anormal de s’étonner tant le récit nous fait partager la convivialité dont chacun peut s’enrichir par la découverte de l’autre.  Un véritable pied de nez à cet individualisme latent de notre société qui déserte ces lieux ! Devoir de mémoire : je pense aux bistrots du village de mon enfance,  à l’époque, j’en recense huit, aujourd’hui je n’en vois plus que trois. Tout comme les raisons de ces disparitions… la vie qui se délite en campagne, la déesse Hygiena devenue reine et le rapport antinomique de l’ivresse et du volant. Le récit incite et séduit à l’idée d’un pèlerinage breton d’un genre « mauvais pour le foie » mais plutôt bon pour la foi en l’Homme. Habitué des bistrots rennais, mon empathie est inscrite dans mes gènes, je n’ai pas beaucoup d’esprit critique à l’égard de ce livre. Il m’aura permis de pointer un regard autre sur mon troquet de quartier. Peut-être qu’au lieu d’acheter mon journal ou mes clopes je prendrais le temps d’y boire un café ou qui sait… un ballon de vin rouge en pensant à mon aïeul, lui l’habitué du bistrot un peu trop vite parti pour m’enticher de plus amples souvenirs… N’hésitez pas à vous jeter sur ce livre ! Et vous en sortirez avec de belles convictions !

Benjamin Vannier

Jean-Yves : un acteur de la scène locale (août 2017)

Si vous poussez les portes du Mondo Bizarro ou du Terminus, vous croiserez sûrement Jean-Yves. Veste en cuir, cheveux longs, barbe bariolée… Une vraie dégaine de rockeur. Le personnage est bien connu des Caf’Con’. Des années qu’il fréquente les bistrots rennais (et pas que) pour entendre du son live. C’est qu’il en a usé des chemises à bouger au rythme des groupes de rock, folk, punk ou metal. Ce soir, il est au Mondo : il vient pour The Dictators, une formation punk-rock américaine qui sévit depuis les années 70. Il les a déjà vus mais peu importe : il sait que ça sera encore différent cette fois. Dans le public, il est devant, au plus près de la scène. Une façon de sentir l’ambiance, de recevoir à bloc ce que vont balancer les zicos. Quand le concert démarre, pas moyen de détourner son attention. Il plonge parfois la main dans sa poche pour en sortir son appareil photo mais ça ne dure pas. L’important est de profiter du spectacle. À la fin du show, on prend un verre, on discute… L’homme est encore dans le concert mais il cite déjà tous ceux qu’il verra demain : des groupes du coin pour la plupart. Il faut dire qu’il en connaît un rayon sur le sujet… Au niveau local, il est presque incollable. Quand il en parle, il évoque les anciens comme Marquis de Sade avec Frank Darcel retrouvé dans le groupe Republik et Daniel Pabœuf – le saxophoniste du groupe qu’il suit toujours – « Je le vois sur scène depuis quarante ans et à chaque fois, je me prends une claque ». Mais aussi des plus jeunes comme Season Of Tears ou Black Boys On Moped. La scène, c’est quelque chose pour Jean-Yves. Un truc éphémère et puissant qu’il sait partager avec les musiciens. Mais bon, il est temps de laisser la parole à ce passionné… on aurait tort de s’en priver.

1 – Ton premier souvenir de musique ?
Steeleye span : c’est du folk-rock. En vinyle. L’un des premiers qui m’a vraiment marqué… Vers 1974. Non, peut-être fin 1973, début 1974.

2 – Quel musicien aurais-tu pu être ?
Tout dépend de mon état du moment. Là, j’écoute plutôt du mélancolique, du cool. Mais c’est vrai que le jeu de scène est important pour moi. Robert Plant, j’adore ! Et Delilah, la chanteuse de The Last Internationale : ce groupe est capable d’aller dans les usines pour soutenir les ouvriers.

3 – Quel regard portes-tu sur la scène locale ?
Absolument génial ! Beaucoup de groupes. Les entrées sont très abordables. Oui… et des styles très différents ! Il y a toujours des nouveaux groupes qui apparaissent. Mais il y a aussi les anciens que je revois parfois dans d’autres formations. Sinon, j’aime bien voir les jeunes, ceux qui débutent : quand ils jouent, ils mettent leurs tripes. Le seul truc que je fais pas, c’est d’aller dans les concerts electro.

4 – As-tu créé des liens particuliers avec des groupes locaux ?
Il y a des groupes qui ont dormi chez moi comme CrashBirds ou Healthy Junkies. Il y a aussi des groupes et des gens avec qui le contact passe bien comme Glam Dicinn ou Tom, le chanteur des Chouch’n’ Molotov. Je pense aussi à Gilles et Mich de Vern ou Aurélie. The Inspector Cluzo aussi : je les ai revus à l’Ubu en début d’année… Bientôt dix ans que je les vois une fois par an. Ils tournent régulièrement. Ce sont des personnages : humainement, ils ont quelque chose à dire.

5 – Et les Black Boys On Moped ?
Oui, je leur ai prêté ma voiture pour leur tournée en Italie. Et ils m’o remercier.

6 – Qu’aimes-tu dans la musique que tu ne trouves pas ailleurs ?
Alors là, tu me surprends. Je peux utiliser mon joker ? Quel groupe de musique ferais-tu jouer devant des extraterrestres ? Je dirais Magma mais c’est juste parce qu’ils chantent en Kobaïen. Mais j’aime bien ce groupe. – Intervention du gars qui prend son café à la table à côté – « Il y a aussi Gong. » Ah oui, Gong ! Un type de musique complètement barré.

7 – Si tu étais un instrument, qu’est-ce que tu serais ? Joué par qui ?
Alors là, j’aime bien la guitare basse. Mais jouée par qui ? Xavier Soulabail le bassiste de Brieg Guerveno et de Buck. J’aime bien la basse quand c’est joué très guitare, dans un duo par exemple. Dans le coin, il y a les Freak Magnet qui font ça : un duo basse – batterie.

8 – La meilleure époque pour la musique ?
Maintenant. Je peux sortir. J’ai suffisamment de fric et je suis disponible aussi. Après, dans les années 70-80, j’ai pris des claques. À la salle de la Cité, avec Shakin’ Street et Little Bob. À l’époque, il y avait des festivals – moins qu’aujourd’hui – mais je me souviens par exemple d’Elixir.

9 – Ton meilleur souvenir de concert ?
Shakin’ Street à la Cité. Et quand je les ai réécoutés, j’avais toujours les frissons. Mais bon, je continue à me prendre des claques. Cette année, par exemple, je suis encore sûr de découvrir plein de trucs à Binic.

10 – Qu’est-ce qui te fait vibrer sur scène ?
Ça peut être l’apparence, se créer un personnage. Et surtout, regarder le public : ne pas se créer une barrière. Je préfère les petites scènes, c’est plus chaleureux.

11 – Quel groupe majeur es-tu incapable d’écouter ?
The Beatles. Alors, heureusement qu’il y avait John Lennon dans le groupe… Parce que McCartney, je supporte pas. C’est trop propre.

12 – Vinyle ou CD ?
Ni l’un, ni l’autre. Plutôt MP3 : c’est plus facile à gérer. J’aime bien le vinyle pour la beauté de l’objet, mais j’ai aussi des CD magnifiques comme celui de 13 Thole.

13 – Rock is dead, tu valides ?
Pas du tout. J’en vois suffisamment qui sont bien vivants. Alors oui, quand tu vois les trucs à la télé et tout ça, ça aurait pu… mais non.

14 – Quel groupe ferais-tu revivre ?
Pff… C’est piégeant ça. The Kinks avec les frères Davies.

15 – Un classement des meilleurs cafés concerts du coin ?
Ça varie. Le Mondo Bizarro, j’y suis parfois allé plusieurs fois par semaine. J’y ai vu plein d’excellents concerts. Passer au Mondo, c’est quand même quelque chose pour un musicien. C’est une institution. Il y a aussi le Terminus et Le Marquis de Sade qui sont plus alternatifs. En fait, j’y suis allé un peu dans tous : le Ty Anna Tavarn et La Cave à Flo mais j’y vais surtout pour l’ambiance. Sinon, il y a les squats comme l’Elabo. J’ai vu Clint là-bas : un mélange de concepts – danse, musique, acrobatie et peinture – c’était vraiment très bien.

16 – Et chez Patrick, à la Fontaine de Brocéliande ?
Oui, j’y ai vu des supers concerts. Parfois, on était qu’une vingtaine dans la salle mais il se passait vraiment quelque chose avec les musiciens. Mais j’y vais un peu moins, ça fait un peu de route quand même !

17 – Le dernier concert avant la fin du monde ?
Oh, tu déconnes. La fin du monde, j’y crois pas. Je m’en fous de la fin du monde.

18 – Si tu croisais Gandhi, quel groupe lui ferais-tu écouter ?
Ah, je mettrai un coup de Ramoneurs de Menhirs. Je trouve qu’il y a des parallèles entre la musique bretonne et indienne.

19 – Un dernier mot ?
Patti Smith et son album Horses, 40 ans plus tard c’est toujours une tuerie.

 

Caroline Vannier

MASS Metal au sous-sol : rencontre avec William (février 2018)

Un ordinateur, une caméra, une bonne connexion… et c’est parti. Aujourd’hui, on peut presque tout faire de chez soi : en quelques clics, il est possible de créer sa propre émission sur Internet. Avec un minimum de matos, des plateformes comme YouTube proposent un cadre et une diffusion quasi immédiate. D’accord… Mais encore faut-il avoir la bonne idée. Le truc qui fera la différence et qui ne s’ajoutera pas à la liste de toutes ces émissions qui poussent sur la toile. Alors, comment se démarquer ? Qu’est-ce qui apporte de la visibilité ? Comment trouver un sujet béton ? STOP… Non ! Alors, là… on a tout faux ! Tout ce baratin ne colle pas du tout avec la vision de William. Oui, c’est vrai, il a sa propre chaîne sur YouTube. Oui, il aime passer du temps sur Internet – il dit avoir un côté geek –. Mais… quand il crée son émission de metal, c’est d’abord à des passionnés qu’il s’adresse. Son but ? Parler de musique, de groupes locaux, de potes, de gens rencontrés sur les routes… c’est ça, son moteur. Tout le reste, il s’en fout. Oh, s’il fidélise un public et qu’il reçoit des commentaires qui font mouche, il ne va pas bouder son plaisir. Mais la visibilité, la course au plus grand nombre de vues, le record d’abonnements à sa chaîne… ça n’a pas d’importance.

Non, parlons plutôt de rencontres, parce que MASS Metal au sous-sol, c’est d’abord l’aventure d’une équipe, ce que nous confirme William : « Oui, ça faisait un moment que j’avais le concept dans la tête ! J’ai rencontré les bonnes personnes et je me suis lancé ». William fédère. Il présente aussi l’émission mais il n’est pas seul. Au cours de notre entretien, il ne cesse de citer les noms de ceux qui bossent à ses côtés : Joeun Lee qui gère la captation et le cadrage vidéo, Théodore du Pontavice qui s’occupe de la lumière et Sylvain Le Roux, le cameraman qui fait tous les montages. Sylvain, c’est avec lui que tout a commencé : « Il fallait que je rencontre des gens motivés et capables de faire du montage. J’ai discuté avec Sylvain que j’avais rencontré en tant que batteur au sein du groupe Blood For Breakfast. C’est par la suite qu’on est devenu de bons amis et colocataires et l’émission a démarré comme ça. » Un concept qui semble simple. Une attitude spontanée devant la caméra… mais est-ce si facile à réaliser ? « Il faut une journée complète (tournage et préparation), souvent le week-end. Le live de l’interview dure 20 minutes : on fait tout d’une traite. Pas d’interruption. Idem pour le blind test. Tout est tourné en one shot. » Pas de faux-semblants dans cette émission, les musiciens parlent de ce qu’ils font comme s’ils étaient à la maison : « S’ils ont envie de passer la soirée avec nous, je propose aux groupes de dormir ici. » Mais il y a du travail ! L’image est de bonne qualité, le son aussi. Théo qui est intermittent du spectacle « étudie bien la lumière mais ne tombe jamais dans le tout studio ou le tout live. Il n’y a pas des light partout. » En découvrant l’émission sur le net, qui pourrait croire que tout est fait dans le sous-sol de la maison de William et de ses colocs ?

À travers une interview et deux morceaux live, MASS Metal met en avant des formations locales. Les spectateurs peuvent ainsi prendre le temps de découvrir ceux qui font la scène à deux pas de chez eux : « j’ai voulu m’installer à Rennes pour la musique, la mentalité, l’ambiance », explique William. Il précise aussi que : « sur YouTube, je ne trouvais pas assez d’émission de metal. Et surtout qui parlent de groupes bretons. Et en plus, on n’est pas loin du Hellfest. » Pour le moment, Faith Off, Jester Smoke Break, Carbonizer, Sideburn et Black Horns ont pris place sur le divan du sous-sol. Mais la liste des groupes que William souhaite inviter est longue !

Et lui dans tout ça ? Qui est-il ? Aurait-il sa place comme invité ? Oui, n’oublions pas que depuis 2013, il est l’un des guitaristes du très bon groupe de stoner Jackhammer. Passionné de guitare depuis un peu plus de vingt ans, il commence à jouer tout seul dans sa chambre à l’île de Groix : « Après plusieurs scènes et quelques passages dans divers groupes – dont ZOT qui a joué au premier Motocultor – j’intègre l’école M.A.I. (music academy international) à Nancy pour perfectionner mes connaissances et ma technique. Et rencontrer des musiciens qui partagent la même passion et le même amour pour la musique. » Là-bas, il croise des gens comme Benjamin Trulla et Guillaume Fabre. William est un technicien mais il a un jeu très ouvert. Adepte du riff efficace, il sait mélanger les genres, proposant toujours une narration solide et détonante. Ceux qui l’ont inspiré ? Deep Purple, Black Sabbath, Pink Floyd… Et dans l’avenir ? Pourquoi ne pas vivre de sa passion ? « Enregistrer des groupes, donner des cours… pourquoi pas ? » C’est tout ce qu’on lui souhaite ! En attendant, un grand merci pour cette émission simple, honnête et originale.

Caroline Vannier

Interview « En coulisses »

1 – Plus de stress avant un concert ou avant une émission ?
Avant une émission. C’est tout nouveau de faire le con devant les caméras.

2 – Est-ce que tu as un rituel avant d’entrer sur le plateau ?
Un whisky et une bonne blague. Impro ou fiches ? J’ai essayé les fiches, mais ça marche pas. J’utilise plutôt des mots clés pour m’aider… et selon la configuration, ça passe. J’essaie d’être le plus humain possible.

3 – À quoi ressemblent les fins de tournage ?
Quand les musiciens peuvent rester, c’est la grosse fiesta dans la baraque. On Jam, on échange des plans zik, on propose des games du genre : karaoké metal, jeux vidéos, billard …

4 – À choisir, quel est le pire : le trou de mémoire ou la blague qui tombe à plat ?
La mauvaise blague. Tout le monde ne comprend pas le second degré.

5 – C’est quoi une question à la con ?
La signification du nom du groupe.

6 – Dans la première émission, pourquoi ces images subliminales de Christine Boutin ? Est-elle devenue malgré elle, un symbole du metal et du Hellfest ?
(Il ouvre de grands yeux et se marre) C’est avant tout un gag de Sylvain. Il n’est pas là, il ne peut donc pas répondre car c’est lui qui a eu la merveilleuse idée. Je dirais que … comme beaucoup on aime pas les politiciens et on aime bien taquiner.

7 – Quand tu te rases le matin, est-ce que tu rêves d’une émission en direct du Hellfest ? Avec qui ?
Non, je rêve pas du tout de ça. Pour être honnête, je respecte le Hellfest mais pour moi, c’est un peu Disneyland. Non, si je dois choisir : ça serait plutôt le Motocultor. Avec qui ? Je sais pas… j’admire beaucoup d’artistes.

8 – Les groupes que tu souhaites inviter un jour dans ton émission ?
Oh là, là… Il y en a plein. Je t’envoie la liste ! Liste envoyée : Big Sure, Tranzat, Les 3 Fromages, Red Dawn, Ultimhate, El Royce, Duckhunters, Geniteur, Marklor, Final Time, Creeping Devil Cactus, Appalooza, Yugal, Glam Dicinn, Origin Hell, Devoid, Belenos, Urban Attack, The Decline, Ultra Vomit, Sticky Boys, Dog’n Style, Tagada Jones, Ayers, Mantra, Discloser, Pictured, Mormieben, Drakwald, Hexecutor, War Machine, Psykup, Steel Rangers, Muttertain, Valse Noot, Eliza Lane, Direwolves, Oblivion, Sadhayena, Season of Tears, Agony of the Bleeding Flesh…

Sur le Web :

Le Fanzine ? Audacieux, libre et Subjectif ! (juin 2017)

Quand on s’intéresse au Do It Yourself, ce qui vient tout de suite en tête, c’est le fanzine ! De nos jours, le web règne en maître en terme de media support mais pour la jeune génération de l’époque, la liberté passait par le papier. Eh oui, mec, la liberté avant le net, c’était le Fanzine ! Apparu dans Les Eighties avec le Punk et destiné à soutenir une scène, un groupe ou tout ce qui suscite l’intérêt, ce média certifié « fabriqué maison » s’est fait une place dans l’univers underground des aficionados de la libre pensée, si chère aux passionnés ! Et pour en savoir plus, rien de tel qu’un esthète : rencontre avec Samuel Étienne, accro aux fanzines depuis une trentaine d’années et fervent pourfendeur de ce trucage papier destiné à soutenir une opinion plurielle mais aussi à apporter une créativité calligraphique et esthétique.

Le Fanzine ! C’est facile à définir – étymologiquement du moins – « un magazine de fan », et rien à voir avec une publication commerciale : pas de pub et donc pas de recette. Le phénomène touche tous les courants musicaux et la diversité est visible sur le papier : en mode noir et blanc ou couleur, en format flyer, en 4 pages ou plus… La charte graphique est souvent peu commune. Leur évolution aussi. Certains sont connus et sont devenus des zines à part entière tels que Magic (pop indé) ou Abus Dangereux – fanzine publié une à deux fois par an depuis 1987 – Une culture qui connaît son apogée avec l’apparition du net et des sites gratuits de types Free à la fin Des Nineties. Des années fleurissantes pour les webzines qui suivent alors des parcours très variés comme Obskure – webzine gothique qui ironie du sort deviendra aussi papier – et Premonition – qui à l’inverse passera du papier au webzine. Le Fanzine est un média purement amateur de par sa nature, même s’il peut être considéré comme un tremplin professionnel (ce que ne manqueront pas de faire les jeunes étudiants des Inrockuptibles). Pendant un temps, le fanzinat – au même titre que le vinyle – est tombé dans l’oubli. Mais aujourd’hui, il refait surface et ce, grâce à la passion de nouveaux et d’anciens tels que Samuel.

Depuis ses années d’étudiant à Nantes, l’intérêt est toujours là. Trente ans qu’il œuvre pour le fanzine ! Car Samuel est un activiste de la cause : à travers sa passion pour la musique indé, il crée avec des potes, des fanzines – tirés jusqu’à 5000 exemplaires – un outil indépendant qui permet à l’étudiant de 18 ans d’accéder aux loges des hauts lieux de la culture rock nantaise de l’époque comme le Floride et l’Olympic. Des projets plein la tête et qui se concrétisent aujourd’hui par des travaux de recherches et de publication sur le monde de la musique : comme par exemple quand il met en lumière avec quelques copains ce qui ne devait être qu’un simple mémoire et qui aboutit à la maison d’édition Melanie Seteun. Il contribue aussi au travail de recherche de Volume – revue sur les musiques populaires – il expose à la FRAC lors du festival Rebel Rebel qui s’est tenu à Marseille en 2016  ou encore au Printemps de Bourges en avril dernier pour une expo sur le fanzine. Une passion pour l’art du graff et du contemporain et en parallèle, la création d’un label Strandfalt en 2013 avec des publications indé (Have The Moscovik, Seilman Bellinsky). Un touche-à-tout qui s’est même essayé à la basse pendant un temps dans un groupe indé ! Au niveau local, Samuel diffuse la philosophie DIY. Installé à Saint-Malo, il lance le projet Daedelus il y a trois ans. La réalisation du fanzine prend une forme collaborative depuis les partenariats conclus avec la médiathèque de La Grande Passerelle et la Nouvelle Vague. Quelques réunions par an et chacun peut contribuer avec ses idées ! L’occasion de faire belles rencontres comme celle de Jacques Villeglé : artiste du mouvement néo réaliste et qui fera la couverture d’un Daedelus. Fanzine de référence de la culture underground dans la cité corsaire : un média qui fait du bien là où les lumières s’éteignent parfois trop vite une fois la nuit tombée… Samuel Étienne n’en a cure et effectue un sacré tour d’horizon avec ses comparses au sein d’un Daedelus libre, gratuit et subjectif. Bref tout ce qui fait du fanzine une « école de l’audace », créative, esthétique, collaborative… En un mot, suivez Daedelus et les projets de Samuel Étienne ! Et si votre passion est autre… faites un fanzine !

Benjamin Vannier

Sur le Web :
www.strandflat.bandcamp.com
www.seitoung.frwww.seteun.nethttps://volume.revues.org/2303
https://strandflat.bandcamp.com/merch/bricolage-radical

Rencontre avec Jérémy de l’asso Ankou Prod (novembre 2017)

Comment organiser un concert de metal ? Qui contacter ? Qu’est-ce qui pousse à franchir le pas ? À toutes ces questions, Jérémy hausse les épaules et répond : « je l’ai fait tout seul sur un coup de tête. J’avais des potes que je voulais faire jouer et je me suis lancé. » Sur l’un des murs de la loge du Mondo Bizarro, il montre le sticker d’un groupe et ajoute : « J’en ai parlé à Thomas, bassiste chez Mantra – qui organise lui-même pas mal de concerts – et qui m’a encouragé à le faire ».

Quand on l’écoute, ça semble simple. En moins de huit mois, son asso – Ankou Prod – a fait jouer 26 groupes : « il y a des noms connus comme Crisix mais aussi les réunionnais de Vacuum Road. J’ai aussi été contacté par des musiciens croates et québécois. » Mais Jérémy encourage surtout la scène locale. Pour sa première orga, il a puisé dans ses économies et a programmé au Mondo trois formations 100 % rennaise : le Géniteur, Man’n Sin et Testymonium. Mais voilà, dans la ville, les asso sont nombreuses : la concurrence est rude. Alors, qu’est-ce qui fait la différence ? Jérémy explique qu’il monte des affiches par genre (stoner, thrash…) pour être cohérent, pour que le public s’y retrouve. Il applique aussi dès qu’il le peut un tarif « Prix Libre » pour que ses soirées puissent être accessibles au plus grand nombre. Et il y a la com’ qui occupe une place importante… cela passe par les affiches et les flyers à déposer un peu partout mais aussi la vidéo : avec Eric, Quentin et Brian, ils font des montages qui présentent les groupes qu’ils programment. C’est du taf et il y a un avantage certain à ne plus tout gérer seul : « Ce soir, on fête le lancement officiel d’Ankou Prod dans sa forme actuelle. Depuis le 21 octobre 2017, il y a un bureau, des bénévoles… ça avance. On a plein de projets… Dans l’avenir, on voudrait bien faire de la captation vidéo. On voudrait aussi avoir un local pour que les groupes puissent répéter, enregistrer et être hébergés quand ils viennent jouer à Rennes.»

Et l’expérience dans tout ça ? Comment la renforcer en si peu de temps ? Jérémy explique qu’il a abandonné ses études très tôt et qu’il s’est mis à fond dans l’événementiel : « j’ai été bénévole au Motocultor, j’ai beaucoup appris là-bas. Et je traîne dans les concerts de metal depuis l’âge de 18 ans (il en a 22), ça aide. » Avant de poursuivre, il se lève et montre le T-shirt qu’il porte : « Je suis aussi beaucoup ce que fait Laurent de Finisterian Dead End, je le considère comme un mentor ». Jérémy jette un coup d’œil à son téléphone : c’est l’heure. Dans moins de 10 minutes, le concert commence. Il a du boulot. C’est le moment de s’éclipser… ou plutôt de trouver une place dans la fosse. Longue vie à Ankou Prod : une asso qui commence à peser dans la scène locale rennaise !

Caroline Vannier

Sur le Web :
https://www.facebook.com/AnkouProd/

Face to Face : au cœur du « Do it yourself » (février 2013)

La débrouille, c’est la figure de proue de l’asso Face to Face. Déjà 9 ans d’autonomie et une volonté de proposer une alternative au système d’organisation de concerts. Pas de grands discours, juste un souhait de « ne pas vendre son cul ». Un engagement qui va de soit et qui fédère !

Ce trip de passionnés de musique rassemble une trentaine d’anonymes. Dans l’asso, pas de chef mais cinq pilotes qui manœuvrent sans calcul et qui savent mouiller le maillot. Tout le monde met la main à la patte ! Y’a qu’à écouter Jonathan, membre actif de l’asso « on a tous notre petite spécialité » : bouffe, programmation, traduction… Des petites mains qui ne chôment pas et qui n’hésitent pas à alimenter eux-mêmes la caisse collective : « niveau budget, on met de notre poche ». Aucune subvention : ici, l’indépendance se gagne en retroussant ses manches ! Le but ? Se faire plaisir et surtout « donner l’opportunité aux Rennais d’aller voir des groupes qu’ils n’auront pas l’occasion de voir ». Face to Face a concocté des affiches avec quelques noms de la scène internationale comme : Cruel Hand, du hardcore américain ; Civet, quatre filles aux commandes d’un groupe punk rock ; Kamikaze Queen, des Berlinois qui mélangent gros son et cabaret… C’est certain : beaucoup de musique extrême mais l’asso sait s’ouvrir à d’autres influences comme le hip hop ou la pop punk. Une ligne de conduite efficace, sachant que Face to Face a invité près de 200 artistes et a su aller chercher un public qui répond toujours présent.

Pas de concert sans public ! Pour une soirée au Mondo Bizarro, au Jardin Moderne ou à la Fontaine de Brocéliande, la promo passe par la rue et par Internet : « les réseaux sociaux c’est pas ce que je préfère mais ça aide grave », explique Jonathan. La communication ne se fait pas en deux clics sur le web, la carte de visite de Face to Face, c’est aussi son visuel. Le look de l’asso interpelle : un design graphique personnel et soigné, un boulot qui porte la griffe de l’asso Skik qui donne régulièrement un coup de main pour la conception d’affiches et de flyers. L’union fait la force : chez Face to Face, la débrouille passe aussi par les partenariats. Dans l’historique de l’asso, on peut voir des collaborations d’un soir avec Enragé Production, Hyptnotique Prod ou Les 3 singes. Une mutualisation qui permet l’émergence de nouvelles idées… En décembre 2013, les internautes ont pris les commandes de la prog : 44 groupes locaux en liste et quatre places pour jouer à la Cité. Une première expérience qui a rassemblé 550 spectateurs. Un succès qui repose sur un sacré coup de flair… L’asso suit ses intuitions et se laisse guider « par le hasard des rencontres ». Elle fonctionne par échanges de dates et n’hésite pas à mélanger formations locales et étrangères. Un système qui abolit les frontières : des groupes bretons comme Hand of Blood ont ainsi pu jouer en Pologne ou en Hollande. Et ce n’est qu’un début, le booking, c’est un projet engagé depuis 2011 et qui prend de l’ampleur. En 2013, un échange est prévu avec Strenghten What Remains, du gros son en provenance de Tampa en Floride. Le rendez-vous est donné ! Face to Face est une asso libre qui fait la part belle aux «  groupes qui ont le même esprit, la même philosophie : des groupes engagés » Un exemple de Do it yourself à méditer…

Caroline Vannier